D’UNE FAMILLE À L’AUTRE
Felipe profite de sa fin d’adolescence dans les fêtes branchées de São Paulo. Sa mère, qui l’élève seule avec sa jeune soeur, lui laisse une grande liberté. Sauf que leur mère n’est pas leur mère: un test ADN prouve qu’elle les a enlevés à la naissance. Séparés, les enfants sont précipités dans leur vraie famille. Les parents biologiques de Felipe, à sa recherche depuis 17 ans, se retrouvent face à un adolescent qui ne partage pas tout à fait leur conception de la vie…
Crise identitaire.
Après Une seconde mère, Anna Muylaert reste dans le thème du bouleversement familial en s’inspirant d’un fait divers qui a marqué le Brésil, celui d’une femme ayant volé des enfants à la maternité et n’ayant été interpelée que des années plus tard, ayant élevé ces enfants comme les siens avant qu’ils soient rendus à leur géniteurs. Mais ce qui intéresse ici la réalisatrice ce n’est nullement les motivations de cette femme, qu’elle écarte très rapidement de l’histoire, mais plutôt la répercussion sur l’un des enfants qui perd en un instant tous ses repères, en passant d’une famille à une autre. Un enfant qui n’en est d’ailleurs plus vraiment un, puisqu’Anna Muylaert choisit justement de se focaliser sur un adolescent en pleine crise identitaire. De là à voir finalement dans le film avant tout la métaphore d’un jeune homme rejetant son passé et son enfance pour enfin assumer ce qu’il est réellement, il n’y a qu’un pas, que pourrait d’ailleurs confirmer le fait que les deux mères soient interprétées par la même actrice (ne serait-ce pas le regard de l’adolescent qui a finalement évolué ?).
Le problème, c’est qu’à l’écran la démarche de la réalisatrice n’est si claire et donne même l’impression qu’elle navigue un peu à l’aveugle entre les deux thèmes développés, d’un côté l’ensemble des questions sociétales posées par le fait divers, de l’autre la crise d’identité sexuelle du héros. Et cela ne va pas s’arranger à mesure que le film avance. Si le début est plutôt réussi, installant le personnage principal avec beaucoup de simplicité et de délicatesse, puis introduisant le mélodrame avec beaucoup de subtilité, maniant alors avec brio l’art de l’ellipse et du hors champ, la réalisatrice accélère dangereusement le rythme du film lorsque l’adolescent emménage dans sa nouvelle famille. Peut-être une volonté de la part d’Anna Muylaert de retranscrire à l’écran une sorte d’électrochoc qui aurait lieu dans la tête de son héros. Mais à vouloir aller trop vite, elle perd en subtilité, tombe dans la facilité et flirte avec les clichés (voir le personnage du père notamment). La fin de D’une famille à l’autre, aussi belle soit-elle dans son ouverture poétique sur des lendemains meilleurs, témoigne néanmoins d’une incapacité pour la réalisatrice de mener sa barque jusqu’au bout et laisse un sentiment frustrant d’inachevé.
La fiche
D’UNE FAMILLE À L’AUTRE
Réalisé par Anna Muylaert
Avec Naomi Nero, Dani Nefussi, Matheus Nachtergaele…
Brésil – Drame
Sortie : 20 Juillet 2016
Durée : 82 min
Je me souviens de ce fait divers. Je n’ai pas encore vu le film mais je suis curieuse de voir la façon dont la réalisatrice à su le mettre en scène.