THE DISCOVERY
Après qu’un scientifique a prouvé l’existence d’une vie après la mort, une vague de suicide sans précédent s’est emparé de la société. Deux ans après sa découverte, son fils lui rend visite au sein d’une île isolée.
Faux positif.
The Discovery débarque sur Netflix comme tant d’autres long-métrages estampillés du géant de la SVOD : sans crier gare. « Cher abonné, ce film devrait vous plaire », nous écrit-on impersonnellement dans le mail. Mouais. On nous la fait pas, à nous. Sauf que celui-ci se distingue un peu des films déjà vus ou des pets bruyants d’Adam Sandler, des comédies gênantes avec Kevin James ou des SF/Action bidons destinés à faire bouche-trou entre deux parties d’Advanced Warfare. Une bannière sur la page d’accueil à base de fils, d’électrodes, une colonne de lumière où sont inscrits les noms Rooney Mara, Robert Redford et Jason Siegel réunis sous l’œil de Charlie McDowell (fils de) suffisent à reconsidérer nos présupposés suffisants. Second long-métrage après le réussi et surprenant The One I Love, The Discovery s’est fait courtiser par Netflix après un passage discret mais sans accrocs à Sundance. Surtout, règle immuable : on ne dit jamais non à un drame d’anticipation.
Nous voilà sur les flots de The Discovery. Le spectateur ne débarque pas directement dans le film, mais accompagne plutôt Will Harbor (Jason Segel, How I Met Your Mother) dans un ferry en direction d’une petite île isolée où vit son père, Thomas (Robert Redford, impeccable) et son frère, Toby (Jesse Plemons, Breaking Bad), nouveaux gourous scientifiques de la vie après la mort. Non contents de l’avoir prouvée, ils cherchent désormais à en enregistrer la destination, images et son à l’appui. Plutôt que d’emmener son film tambour battant sur une pluie d’images de synthèse et d’effets numériques visant, ironie, à matérialiser le numérique, Charlie McDowell, misant de nouveau sur son tandem avec Justin Lader au scénario, préfère prendre son temps et mettre en scène un fardeau invisible qui se délie au gré de l’intrigue. C’est par ce biais qu’intervient Isla (Rooney Mara), femme aux démons cachés dont la vigueur des piques de dialogue ne cachent que trop mal une souffrance sous-jacente.
Paradis ou enfer
Grisaille, nature morte, passage par la morgue, protagonistes hantés et personnages secondaires comme des ombres qui hantent les lieux plus qu’ils ne l’habitent : on retrouve, sans le crime ni l’archétype de l’inspecteur, les ingrédients du polar nordique à la Millenium, Les Enquêtes du Département V ou L’Hypnotiseur. Sauf que, malheureusement pour lui, The Discovery trouve plus d’éléments de comparaison avec l’ennui poli et les personnages fades du dernier de la liste précédemment citée que du poids et de la tension des deux premiers. Deux raisons à cela. D’abord, le casting de Jason Segel est à remettre fortement en question. En forçant un jeu de façade, l’acteur semble extrêmement mal à l’aise en dehors de sa zone de confort, celle des gentilles comédies générationnelles. Impossible dès lors d’appliquer une quelconque profondeur à son personnage. L’exploration de ses relations entre père et mère ne peuvent rien y faire.
L’autre grand enjeu absent de The Discovery, et le plus pénalisant, c’est aussi sa dimension fantastique, ou d’anticipation. D’abord discrètes tant que la mort cérébrale n’est pas sur le monitoring, les révélations quand à l’au-delà ne méritent pas cette dénomination et sont quasiment traitées comme les indices d’une enquête criminelle – on retrouve, là encore, les inspirations des polars scandinaves. Le spectateur repousse chaque séquence un peu plus l’espoir d’une élévation du propos et des enjeux surnaturels de la narration, jusqu’à l’abandonner finalement. Non pas qu’elle ne soit pas ultimement traitée, mais McDowell n’est jamais à la hauteur de son sujet, semble incapable de le dépasser et vogue de platitude en platitude.
On espérait de The Discovery un électro-choc, la preuve d’une production Netflix mature qui sait se mettre à la hauteur des rendez-vous, comme l’a fait en son temps l’excellent The Invitation. Sans être énervant ou frustrant sur la forme, le film se tire une balle dans chaque genre, le drame autant que l’anticipation. The Discovery s’oublie aussi rapidement qu’il est apparu sur la page d’accueil de Netflix, qui aime visiblement tout ce qui est éphémère. Un comble face à un sujet pourtant passionnant.
La fiche
THE DISCOVERY
Réalisé par Charlie McDowell
Avec Jason Segel, Rooney Mara, Robert Redford…
États-Unis – Drame, Anticipation
Sortie : 31 mars 2017
Durée : 102 min