LES FILLES DU DOCTEUR MARCH
Critique du film
Il y a derrière Les Filles du Docteur March plus d’un siècle d’adaptation, de visages qui se sont succédés pour donner vie aux quatre sœurs du roman de l’auteure Louisa May Alcott. Un récit culte qui a traversé le temps pour raconter l’histoire de quatre femmes pendant la guerre de Sécession, de leurs désir et leurs ambitions, et surtout d’une sororité infaillible face aux conventions de la société et à la pauvreté. Après le succès critique de son Lady Bird, Greta Gerwig se lance à son tour dans l’adaptation du roman avec lequel elle s’autorise quelques libertés.
Se débarrassant de la lumière faiblarde et des sourires trop sages des précédentes adaptations, Les Filles du Docteur March métamorphose le récit en un tourbillon de lumière qui emporte tout du long sur ses deux heures de film. L’énergie débordante des quatre sœurs se transcrit par une cacophonie permanente, renforcé par un montage frénétique. Greta Gerwig fait le portrait de femmes aux aspirations et aux personnalités parfois antithétiques. Si Jo attire tous les regards, par son goût de la liberté et son refus des conventions, Meg fait le choix d’un mariage pauvre mais heureux, tandis que Amy, personnage souvent détesté par ses caprices, rêve de richesse et de célébrité. Les désirs de chacune ne sont ainsi jamais remis en question, et au contraire, participe à à renforcer des personnalités hétéroclites, renversant au passage l’idée qu’il n’y a qu’un seul type de féminité.
L’union fait la force
Les Filles du Docteur March place ses femmes au centre du récit et les filme chacune avec autant d’amour et de bienveillance, dressant ainsi leur portrait sur plusieurs générations mais toutes liées par une même cohésion, qui dynamite le récit. Si Saoirse Ronan et Florence Pugh (sans aucun doute la grande révélation de 2019 – pour ceux qui n’auraient pas vu The Young Lady) crèvent l’écran, le film trouve un équilibre parfait dans sa sororité, laissant autant de place aux aspirations de Beth (Eliza Scanlen) et de Meg (Emma Watson). La véritable force du film réside dans sa capacité hors-norme à dessiner des personnages authentiques, à fabriquer des êtres de chair, dont Greta Gerwig explore toute l’humanité, décuplant ainsi une véritable identification.
Ainsi, il y a quelque chose de profondément bouleversant, dans la force optimiste qu’offre cette scène d’imprimerie. Les mots s’impriment derrière une couverture de cuir vert, sous les yeux remplis de fierté de son auteure, rendant hommage à toutes ces femmes, derrière une plume ou une caméra, capable d’entrer dans l’Histoire. Les Filles du Docteur March capte la fin de l’adolescence dans un film solaire et passionné, confirmant le talent de Greta Gerwig, qui en deux films à peine, s’est imposée comme une grande réalisatrice.
Bande-annonce
1er janvier 2020 – De Greta Gerwig, avec Saoirse Ronan, Florence Pugh, Timothée Chalamet