ADN
Neige, divorcée et mère de trois enfants, rend régulièrement visite à Émir, son grand-père algérien qui vit désormais en maison de retraite. Elle adore et admire ce pilier de la famille, qui l’a élevée et surtout protégée de la toxicité de ses parents. Les rapports entre les nombreux membres de la famille sont compliqués et les rancœurs nombreuses… Heureusement Neige peut compter sur le soutien et l’humour de François, son ex. La mort du grand-père va déclencher une tempête familiale et une profonde crise identitaire chez Neige. Dès lors elle va vouloir comprendre et connaître son ADN.
CRITIQUE DU FILM
Jusqu’à quel point notre famille, notre génétique nous définit ? Question loin d’être dénuée d’intérêt, mais que Maïwenn, avec son nouveau film, peine à rendre intéressante. ADN s’ouvre pourtant sur de relatives belles promesses, notamment autour de la perte d’un grand-père, volontairement expéditive. On saisit alors bien, notamment grâce à la performance de Dylan Robert, que l’on est ravi de retrouver après Shéhérazade, toute la puissante dramatique de ce décès.
ADN se déroule alors sous les auspices d’une famille désunie, que rien ne semble rapprocher, si ce n’est les liens du sang. Mais à défaut de traiter cette famille comme un organisme vivant, pluriel et complexe, à la manière d’un La Graine et le Mulet, Maïwenn se concentre sur la crise existentielle de son propre personnage : Neige. Problème, le film ne se concentre que sur cette crise, qui n’inclut quasiment pas les autres membres de sa famille. Devant cette configuration familiale dysfonctionnelle, Neige cherche ses propres origines, qui ne sont pas celles a priori escomptées.
SEULE CONTRE TOUS
« Si ce n’est la génétique, qu’est-ce qui me lie à mon grand-père, à ma famille, à mes origines ? » Ainsi peut-être résumée la crise existentielle de Neige. Une réponse que le spectateur devine facilement, mais que le film ose apporter qu’à demi-mots : les origines se décident dans la tête et le cœur, avant d’être dans le sang et la génétique. Le film tourne alors – très – rapidement en rond, avant un final poussif et balourd, conclusion de l’idée selon laquelle vivre là où son grand-père a vécu apparaît comme la connexion ultime avec l’image que l’on se fait de sa famille. Une résolution aisément anticipable, et dont la mise en scène finale, qu’envierait les meilleurs spots publicitaires de tour-opérateur, achèveront le spectateur déjà irrité par la banalité du propos.
Cette simplicité laisse un grand goût d’inachevé au film, qui se termine alors qu’il y aurait toute une moitié du film à raconter. La décision de Neige est également rapidement traitée, et d’aucuns pourraient déceler un léger sentiment d’exotisme dans son désir d’exil, devant sa vision enchantée de son pays d’origine, vision attachée à des repères symboliques et de facto exotiques de son point de vue d’occidentale. Autant de critères propices à l’exaspération du spectateur, qui voit batailler Neige, caricature de personnage en crise existentielle – le genre dont l’appartement parisien contient un demi-million de livres – que l’on ne voit faire autre chose que se languir.
Le récit concentré sur Neige, les autres membres de la famille se retrouvent télescopés çà et là, sans que cela ne souligne foncièrement le cheminement psychologique de Neige. Le personnage de Dylan Robert disparaît rapidement, tandis que d’autres n’apparaissent que ponctuellement, le temps de bribes d’interactions avec Neige, comme sa sœur, interprétée par Marina Vacth. Ses apparitions fugaces ne servent qu’à mettre en scène un conflit sororal non-expliqué et vite résolu à grands coups de câlins sur un balcon.
Le personnage de Fanny Ardent subit à peu près le même traitement, mais s’en sort avec les honneurs le temps d’une scène de confrontation douloureuse avec sa fille. Une présence moindre qui rentre en contradiction avec les relations familiales profondément exaltés que souligne le film à ses débuts. D’autant que la présence de la famille autour de Neige aurait été un formidable moyen d’étoffer la crise que traverse le personnage. Mais il n’en est rien, et quiconque s’avise de faire vaciller les idées de Neige se retrouvera mis au ban du scénario et oublié par les spectateurs.
En se concentrant sur les affres psychologiques de sa protagoniste principale, ADN ne parvient pas à se rendre palpitant. En revanche, il dispose d’un Louis Garrel flambant neuf, chargé en munitions comiques, dont chaque réplique fait mouche et apporte beaucoup de répit à ce récit ennuyeux.