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SEULS LES ANGES ONT DES AILES

En escale à Barranca, petit port bananier d’Amérique du Sud, Bonnie Lee rencontre les pilotes de l’équipe aéropostale de ce lieu hors du temps, où l’on meurt comme on vit : avec bravoure. D’emblée, l’artiste new-yorkaise est subjuguée par le séduisant et intrépide Geoff Carter, qui dirige la compagnie et n’est pas le genre d’homme à laisser des sentiments interférer dans ses missions et dans son monde, où le danger est omniprésent et où tout peut basculer en un instant, au gré du hasard et des tempêtes…

Critique du film

Réalisé en 1939 par Howard Hawks, qui était depuis longtemps un fou d‘aviation, Seuls les anges ont des ailes compte probablement parmi les plus grandes réussites de son metteur-en-scène. Par la rencontre entre Cary Grant, avec lequel Hawks avait tourné L’Impossible Monsieur Bébé l’année précédente, et Jean Arthur, même si cette dernière eut des rapports plus compliqués avec le réalisateur. Par la richesse des thèmes qu’on retrouve souvent chez Howard Hawks : l’amitié virile, les rapports hommes femmes non dénués d’une sorte de joute amoureuse – conflit qui tourne souvent à l’avantage de la gent féminine –, l’esprit d’équipe et d’aventure et le groupe de professionnels pour lesquels on existe en fonction de la façon dont on fait son job, dont on exécute sa mission. 

Faire face à la mort et au chagrin, festoyer pour nier l’indicible et la perte d’un camarade – superbe scène où Cary Grant se met au piano, passage drôle et teinté d’humour noir du steak qu’il ne faut pas gâcher – le film nous montre des hommes au départ ordinaires, mais que leur mission rend extraordinaires. Ainsi que l’esprit qui anime le groupe. Honneur et fierté de bien faire son job, courage et rédemption, camaraderie et refus de juger définitivement un homme qui a failli dans le passé, toutes ces valeurs transparaissent dans Seuls les anges sont des ailes.

Seuls les anges ont des ailes

Le personnage de Mac Pherson, joué par Richard Barthelmess, star du muet qui faisait un très beau retour avec ce film, représente un des atouts non négligeables du film. Personnage au départ rejeté par le groupe, pour avoir failli dans le passé, il offre à Hawks qui admirait le personnage de Lord Jim de Joseph Conrad, la possibilité de donner un aperçu contrasté de sa vision de l’homme, vision parfois cruelle et misanthrope, non dénuée d’une certain mépris, comme le fait remarquer Noël Simsolo dans un des suppléments de l’édition très riche que propose aujourd’hui Wild Side du film. Mais avec toutefois, l’opportunité d’une seconde chance. 

De haut vol

Hawks eut l’idée de tout reconstituer en studio et de filmer des maquettes d’avions. Malgré cette recherche volontaire de l’artifice et en dépit de certains aspects improbables, on reste totalement captivé par le film, grâce à ses dialogues et scénario brillants – Jules Furtman avait beaucoup travaillé avec Josef von Sternberg, que Hawks admirait énormément – ses enjeux amoureux ou liés à l’estime de soi qu’on veut retrouver et au côté formel du film. La photographie de Joseph Walker est magnifique et la restauration 4K lui rend parfaitement justice. L’image est impeccable et c’est toujours un plaisir de redécouvrir de cette façon un film vieux de plus de quatre-vingts ans. Cette édition est à la hauteur de la qualité artistique du film de Hawks : en plus des suppléments passionnants avec  Noël Simsolo, un livret de 50 pages écrit spécialement par Doug Headline revient sur le film avec de nombreux détails et met l’accent sur le fait que Seuls les anges ont des ailes constitue l’un des sommets de la carrière de Hawks, en réunissant les thèmes préférés de ce fou d’aviation et de courses d’automobiles. Parsemé d’informations sur le tournage et l’accueil du film, ce texte exclusif comporte également de superbes photos du film.

On a affaire ici à un des films majeurs du cinéma, un film où il est question d’amour, d’héroïsme, de cynisme affiché, qui masque peut-être une forme de pudeur – superbe idée de l’utilisation du jeu du pile ou face. Marquant les débuts de la jeune Rita Hayworth, film devenu très vite un classique incontournable, Seuls les anges ont des ailes est disponible en combo Blu-Ray+ DVD, édité par Wild Side et accompagné d’un livret exclusif rédigé par Doug Headline et de suppléments qui soulignent l’importance de ce chef d’œuvre intemporel. Restauration 4 K de toute beauté.

 


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