LA JEUNE FILLE ET L’ARAIGNÉE
Pendant des années, Lisa a vécu en colocation avec Mara et Markus. Mais le moment de prendre un appartement pour vivre seule est enfin venu. Un curieux manège de désirs prend son envol. Un film catastrophe tragi-comique, une ode poétique au changement et à l’éphémère.
Critique du film
Les deux réalisateurs suisses de La Jeune fille et l’araignée, Ramon Zürcher et son frère Silvan Zürcher, se sont inspirés de la séparation qu’ils ont connue après avoir vécu longtemps ensemble. Cette douleur diffuse que ressentent les êtres qui se quittent après avoir été liés constitue le thème central de ce film qui s’inscrit dans une trilogie dont il est le second volet. Le premier long-métrage des deux frères, L’Etrange petit chat, avait connu un succès certain à la Berlinale de 2013 et avait été présenté dans de nombreux festivals. Dans cet ensemble de trois films – dont le dernier chapitre s’intitulera The Sparrow in the chimney – il est question de la famille et du réel qui bascule parfois dans l’irrationnel, mais aussi de l’intimité des relations humaines.
On trouve dans ce film produit en suisse et réalisé dans une brasserie désaffectée, dans laquelle plusieurs appartements ont été reconstitués, un mélange de détails très quotidiens, très réalistes et de touches d’étrangeté, apportées subtilement. La mère de Lisa semble inquiète et scrute les réactions de Mara, qui paraît supporter difficilement la séparation avec son ancienne colocataire. La caméra des réalisateurs, souvent statique, s’attarde beaucoup sur les visages, les regards des interprètes. Et l’importance que des metteurs-en-scène comme Antonioni ou Bergman a eue sur les frères Zürcher se ressent dans l’acuité de la description des rapports humains et des signaux avant-coureurs du délitement ou du malaise qui vient insidieusement gangréner une relation.
Un bouton d’herpès, un canapé jaune dont la couleur signifie beaucoup pour certains personnages, une nuit d’orage qui distille une atmosphère à la limite du fantastique, tous ces éléments apportent au film une touche d’onirisme. Les rêves qu’on fait, qu’on se raconte, les petits signes du destin viennent marquer la fin d’une époque, une page qui se tourne. Ce travail de deuil d’une relation importante que fera ou pas Mara, les récits qui se tissent autour de cet emménagement font l’objet d’une histoire mise en scène et interprétée avec sobriété, une certaine poésie, et qui se termine dans un délicat mélange de tristesse et de sage résignation.
Bande-annonce
20 octobre 2021 – De Ramon & Silvan Zürcher
Avec Henriette Confurius, Liliane Amuat, Ursina Lardi