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BONES AND ALL

Maren Yearly est une jeune fille de seize ans. Elle parcourt le pays dans l’espoir de retrouver son père. Elle espère ainsi comprendre pourquoi elle a tué bon nombre de ses amis car elle se contient pour ne pas repasser à l’acte.

Critique du film

Bones and all marque la deuxième collaboration du duo composé par Luca Guadagnino et Timothée Chalamet après le succès planétaire de Call me by your name (2017). C’est aussi une nouvelle incursion dans le thème de l’horreur après une version de Suspiria très personnelle, où l’on retrouvait Dakota Johnson et Tilda Swinton dans les premiers rôles. Le point d’entrée dans cette histoire est assez différent de cette première aventure dans le cinéma de genre horrifique, car il se fait par des références plus proches du Terrence Malick de La balade sauvage que du giallo de Dario Argento. Tout le cœur du film se déroule dans ces lieux reculés des territoires intermédiaires du continent Nord américain, entre petites villes et déserts sauvages dénués de population. C’est ce premier point qui retient l’attention : le réalisateur italo-américain prend un chemin de traverse pour raconter son histoire, sans affronter l’épouvante directement, préférant recueillir des symboles de l’Americana rurale.

Maren est une jeune femme qui vient de fêter ses 18 ans et qui à cause d’un drame se voit tout quitter en l’espace de quelques jours, son père, son foyer, sans plus aucun repère autre qu’une K7 audio laissé par ce seul parent qui décide qu’elle doit désormais voler de ses propres ailes. Des bribes de cette voix rocailleuse ponctuent chaque morceau de la narration, tels des chapitres articulant les temps forts du film, dans une fuite ininterrompue qui ne peut se terminer que dans le drame. Passé ce premier temps de latence, le récit rentre dans le vif du sujet et se montre très brutale et graphique dans sa représentation de l’horreur. La révélation de la nature de Maren n’est aucunement dissimulée, Guadagnino décide de tout montrer pour faire comprendre au spectateur la gravité de la situation dans laquelle elle se retrouve catapultée.

Cette première scène très dure semble alors lancer le film sur des horizons sanglants, pourtant il n’en est rien. Très rapidement, Bones and all se rassemble autour d’un autre événement, la rencontre de Maren et de Lee, laissant bien vite en arrière plan toute la dramaturgie déployée. Dès lors un constat implacable fait forme dans nos esprits : est-ce que le film ne serait pas peu ou prou le même sans les éléments d’horreur qui sont saupoudrés à intervalles réguliers autour du couple de jeunes gens ? L’aspect romance est devenu à ce point central et moteur de l’action, qu’ici encore la référence à La balade sauvage, ou à une sorte de Bonnie & Clyde revisitée, réapparaît avec de nouvelles similitudes troublantes. Les codes du genre qui sont énoncés dans la première partie du film ne sont que guère exploités par la suite, et tout cet univers se retrouve résumé à peu de choses, presque un prétexte narratif qui n’intéresse pas plus que ça l’auteur.

Tout ceci présente une énorme limite au film qui mise tout sur son couple d’acteurs auquel on a bien du mal à croire. L’écriture de leur rencontre, ce moment où Lee apparaît dans le champ couvert de sang dans un bond de funambule, a dès lors capté toute l’énergie qui aurait du se diffuser dans l’ensemble du film. L’alchimie entre Timothée Chalamet et Taylor Russell McKenzie paraît bien laborieuse, à tel point qu’il est difficile de comprendre pourquoi ce couple est aussi fusionnel face à toutes les raisons qui auraient du les amener à reconsidérer l’idée de traverser cette histoire côte à côte. Ce choix de mise en scène d’avoir voulu les regarder presque exclusivement, au détriment par exemple du personnage de Sully joué par un glaçant Mark Rylance, est sans doute le plus grand échec du film qui peine à exister uniquement sur cet axe bancal qui aurait mérité plus de chair autour de lui.

Bande-annonce

23 novembre 2022 – De Luca Guadagnino, avec Timothée Chalamet, Taylor Russell McKenzie et Michael Stuhlbarg.


Présenté en compétition à la 79ème Mostra de Venise.