TENDRES PASSIONS
Aurora a élevé seule sa fille Emma, excluant tout homme de sa vie. Pourtant, Emma quitte à la première occasion cette mère abusive. Seule, Aurora rencontre alors Garrett, un ancien astronaute désormais alcoolique… Des liens affectifs prennent forme entre eux.
CRITIQUE DU FILM
Parfois, certains artistes parviennent à taper juste dès le premier essai, quand d’autres ont besoin d’un rodage. James L. Brooks fait partie de cette catégorie. Dès son premier film, Tendres passions (Terms of endearment), sorti en 1983, tout ce qui fera le sel de son œuvre à venir est déjà présent. Récompensé par cinq Oscars, alliant succès public et critique (sauf en France où le film a été décrié à sa sortie),le film nous plonge dans la relation toxique entre une mère possessive et sa fille qui tente de s’arracher à ses crocs en se mariant.
Après avoir débuté en tant que producteur pour la télévision dans les années 1970, Brooks écrit le scénario et co-produit en 1979 un film tombé aux oubliettes : Merci d’avoir été ma femme… dont il laisse la réalisation à Alan J. Pakula. Adaptant un roman de Larry McMurtry, c’est avec Tendres passions qu’il fait ses débuts derrière la caméra pour cette histoire qui vogue constamment entre comédie et drame, adoptant un ton d’une grande fraîcheur doublé de sincérité.
Dans le rôle de la mère abusive, femme malheureuse, veuve ayant focalisé toute sa vie sur sa fille, Shirley MacLaine est formidable et en impose comme toujours par sa présence si charismatique. Debra Winger, actrice un peu oubliée aujourd’hui (son mauvais caractère lui aurait joué des tours selon la rumeur), campe une jeune femme pleine d’espoir qui cherche à s’émanciper.
Difficile de raconter l’histoire sans en dévoiler l’intrigue et gâcher le plaisir. Tout au plus peut-on dire que la veuve névrosée va progressivement se détendre en faisant la connaissance de son voisin, un astronaute à la retraite joué avec malice par le grand Jack Nicholson (le rôle lui vaudra un Oscar ainsi qu’à MacLaine). En abordant des sujets simples comme la vie de couple, la tentation de l’adultère, la peur de s’engager, la maladie, les personnages de Brooks s’ébattent avec une telle véracité des sentiments que cela bouleverse.
Le film est constamment drôle, parfois émouvant, toujours touchant. Il sait capter l’essence de la comédie humaine avec acuité et sensibilité. Avec trois Oscars en poche (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario adapté), Brooks va poursuivre une brillante carrière en tant que réalisateur, avec des succès comme le génial Broadcast News (1987) ou Pour le pire et pour le meilleur (1997), mais aussi en tant que producteur avec Les Simpson. La réédition en salle de Tendres passions est une bonne occasion de (re)découvrir ce premier essai réussi, un genre de film dont Hollywood semble avoir perdu la recette.