PETITES
Critique du film
Camille a 16 ans. Par accident, elle se retrouve enceinte et ne le découvre que trop tard. Le délai d’intervention de grossesse est passé, elle est au pied du mur. Par désespoir, elle tente de tuer le foetus mais son acte tire la sonnette d’alarme des services sociaux et elle se retrouve placée en établissement de maternité, malgré son opposition et celle, véhémente, de sa mère. Confiée à Nadine, sa référente au centre, l’adolescente doit commencer à prévoir l’avenir. En conflit face à cette figure d’autorité, elle trouvera néanmoins un semblant de cadre, de sécurité affective et de raison pour la préparer à l’inévitable et l’accompagner sur la fin de sa grossesse afin de faire le choix impossible : garder l’enfant ou accoucher sous le secret et le confier à l’adoption.
Pour son premier long métrage, Petites, Julie Lerat-Gersanti nous embarque dans un environnement qu’elle a assidûment fréquenté, ces centres de maternité peuplés de mères adolescentes et de leurs enfants en bas âge. Marquée par le mélange d’insouciance et de charge parentale chez ses filles n’ayant pas encore atteint la majorité et pourtant déjà placées face aux responsabilités de la maternité, la cinéaste filme la réalité, rude, désillusionnée et néanmoins parfois chaleureuse et emplie de sororité. Aucune de ces jeunes filles ne se trouve là par hasard. Pour nombre d’entre elles, on retrouve un peu de déterminisme et de répétition de schémas familiaux, mais très souvent un enchaînement de mauvais sorts.
Avec Petites, elle signe un portrait de femme (et de mère ?) en devenir, à la croisée des chemins. Négligée par une mère immature et égocentrée, qui comble son manque affectif auprès de sa fille entre deux relations toxiques, elle prend progressivement conscience de tout ce dont elle a manqué au contact des adolescentes du centre et de ses éducateurs. C’est finalement en se prenant d’affection pour une petite fille du centre, Diana, que Camille se découvre un élan protecteur. Est-ce de l’instinct maternel ou ne projette-t-elle pas finalement sur cette enfant sa propre histoire, alors que la fillette est négligée par sa mère qui lui préfère les sorties en boîte de nuit et les flirts ?
Influencée par Ken Loach, les Dardenne mais surtout Andrea Arnold, Julie Lerat-Gersanti filme son héroïne dans son cheminement, au plus près de ses personnages et de sa courageuse protagoniste principale. Avec réalisme et un brin de lyrisme, elle livre un joli drame moderne et sensible sur la transmission et la transgénérationnalité, et révèle au passage une remarquable jeune comédienne, Pili Groyne, qu’on espère vivement revoir sur les écrans rapidement.
Bande-annonce
22 février 2023 – De Julie Lerat-Gersant, avec Pili Groyne, Romane Bohringer