hit big

HIT BIG

Sur la Costa Del Sol espagnole, Marjaleena, 60 ans, alcoolique, ex vice-Miss Finlande, tient le Bar Belle au bord de la faillite, aidée par son fils et son homme à tout faire. Fraîchement sorti de prison après 20 ans, Worm, son mari violent, s’apprête à vivre des recettes d’un ancien braquage, avec son amant et compagnon de cellule. Marjaleena ne l’entend pas de cette manière !

Critique du film

Opérant un tournant radical après son très remarqué Dogs don’t wear pants, le réalisateur finlandais J-P Valkeapää pose cette fois-ci sa caméra dans les brûlants paysages espagnols de la Costa del Sol. C’est ici que vit Marjaleena, qui, loin de ses contrées, se raccroche à sa gloire passée, plusieurs décennies après avoir décroché la position de deuxième Dauphine à l’élection de Miss Finlande. On découvre ainsi une reine de beauté sur le retour, noyée depuis longtemps dans les vapeurs de l’alcool, aux commandes d’un bar appartenant à son mari, emprisonné après un braquage. Sorti de prison, l’homme compte profiter du butin, mais sans sa femme, qu’il a depuis remplacé et éjecté du bar. Alliée à Mikko, son associé en affaires et Vili, son fils, Marjaleena compte bien profiter de sa part.

Voilà un film qui donne chaud, tant par son environnement caniculaire que par son rapport aux corps, ainsi qu’à la promiscuité de la caméra sur ces peaux suintantes et burinées. Cette physicalité qui place immédiatement les personnages sur l’échelle sociale apporte également un caractère pittoresque à ces images saturées. On pense bien-sûr aux Affreux, sales et méchants d’Ettore Scola, même si, du dernier adjectif, ce trio inoffensif n’a que l’apparence. Ils ne dérangent personne tant qu’on les laisse végéter dans leur vodka pour oublier la dureté de la vie. Affreux et sales, en revanche, le réalisateur s’est assuré qu’ils le soient, y compris Marjaleena, comme pour contrer l’idée reçue de la belle Scandinave, blonde et saine.


Autre leitmotiv mis à mal, celui du cinéma nordique adepte d’un humour grinçant, à l’image de son climat froid et sombre. Or, malgré des références ancrées dans notre imaginaire cinématographique, s’il y a bien quelques rires gênés, c’est plus de désolation dont il est question ici. C’est un portrait sincère et sans complaisance d’existences marginales vécues au milieu de la crasse et des cheveux gras, de trajectoires déviées des ambitions premières mais unies néanmoins par le sentiment universel de l’amour, qu’il soit filial ou conjugal.

Ce film est comme une carte postale figurant le genre de paysage ensoleillé qu’il faut connaître pour en saisir le charme, une carte avec des tâches d’encre et des empreintes digitales grasses au verso et dont le texte indiquerait aux moralisateurs qu’ils peuvent bien aller se faire voir.


De J.P. Valkeapää, avec Pääru Oja, Outi Mäenpää et Johannes Holopainen.


l’Étrange festival 2023