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LUMIERE 2023 : Fabrice Luchini enflamme la Halle Tony Garnier

Samedi 14 octobre 2023 s’est ouverte la 15e édition du Festival Lumière lors d’une cérémonie animée par Thierry Frémaux devant 4 500 spectateurs à la Halle Tony Garnier de Lyon. Des festivités qui débutent au cœur d’une actualité tragique sur laquelle est revenue Irène Jacob en souhaitant « vivre cette fête comme un geste de paix ». « Plus que jamais nous avons besoin de croire aux rêves » a poursuivi la présidente de l’Institut Lumière, « en regardant un grand écran on est parfois pris d’un sentiment d’immensité, d’ouverture ; une immensité qui n’est pas un infini qui nous échappe mais, au contraire, une proximité, (…) comme si ce principe d’humanité et de fraternité pouvait nous saisir et élargir notre esprit, notre âme. » « Le cinéma c’est un regard qui se donne, qui se pose, (…) et si voir et regarder c’était déjà une façon de mieux aimer, de mieux vivre ? », a conclu l’actrice dans une invitation à la paix.

La cérémonie a, comme d’habitude, proposé un avant-goût du programme de la semaine à venir, des films de Wim Wenders, qui recevra le Prix Lumière, aux cinémas de Denys de La Patellière ou Robert Altman, qui auront l’honneur de belles rétrospectives, en passant par Ana Mariscal pour l’histoire permanente des femmes cinéastes, des films rares et inédits d’Ozu, un hommage à Jane Birkin, la célébration du centenaire du studio Disney, des invitations à Wes Anderson, Marisa Paredes, Alexander Payne, Karin Viard, Taylor Hackford, Terry Gilliam, et bien d’autres rendez-vous encore. Un panorama qui était cette année mis en parallèle avec un clip bilan de l’ensemble des précédentes éditions, qui a pu raviver la nostalgie des festivaliers et montrer comment Lumière a su au fil du temps embrasser l’Histoire de tous les cinémas.

Le festival a ensuite tenu à remercier les bénévoles qui le font vivre, en leur offrant un tour d’honneur sous des applaudissements nourris. La tradition a ensuite été respectée avec la projection d’une série de films des opérateurs Lumière dans des copies magnifiquement restaurées. Puis la Halle s’est transformée en karaoké géant lorsque les 4 500 spectateurs ont repris en cœur les paroles d’Aline de Christophe, en l’honneur de Wes Anderson, qui a utilisé la chanson dans The French Dispatch. L’ambiance n’est pas retombée quand il s’est ensuite agi de lancer officiellement le festival.

Lumière 2023

Mais le moment le plus marquant de la soirée restera sans conteste la montée sur scène de l’invité d’honneur de cette ouverture, Fabrice Luchini. « Impressionné » par les 4 500 spectateurs, l’acteur confesse comprendre alors ce que ressentait Johnny Hallyday, là où lui n’a joué « que » dans des salles de maximum 800 places. Pour autant, il semblait totalement à son aise et a offert au public exalté un show digne de sa réputation, virevoltant d’une idée à l’autre, avec son légendaire débit de paroles, pour saluer le travail du Festival Lumière et partager le cinéma qu’il aime. Bouleversé par la programmation faisant se côtoyer des « modèles » tels que Lino Ventura, Fernandel, Ozu, Bertrand Tavernier ou encore Marcello Mastroianni, il a vu que « le cynisme, le politiquement incorrect étaient balayés par une envie d’être converti à l’indulgence, comme au théâtre où une humanité immense retient notre agressivité pour que l’on devienne spectateurs de la vie ».

Il a ensuite partagé avec le public son amour du cinéma de Guitry et de Clouzot, « parce que ce cinéma, c’est la parole, mais pas la parole des mots, mais celle qui incarne l’éternité des silences ». Puis Luchini a évoqué Bernard Blier, « le plus grand acteur français de tous les temps », et Louis Jouvet, « un homme qui nous demande d’aller vers les écrivains et les auteurs pour dépasser notre narcissisme de comédien », avant de parler de la façon dont le cinéma faisait ressortir la vérité des acteurs. « La caméra nous débarrasse de l’effort technique physique, qui fait que souvent on peut jouer en force au théâtre. Le cinéma réalise le miracle de filmer l’être. Il n’y a pas de cinéaste qui ne filme pas un acteur pour en faire son portrait. (…) Le cinéma ne ment pas, il pénètre dans notre âme. »

Comme film d’ouverture, Fabrice Luchini avait choisi Sunset Boulevard, dont la narration, régie par une voix off, doit pour lui beaucoup au cinéma de Guitry. Le film de Billy Wilder était par ailleurs parfait pour clore cette soirée, tant il résonne avec ce que défend le festival depuis ses débuts, dans sa façon de parler du cinéma, de son Histoire, de son évolution, et dans sa capacité à le fait revivre. Le Festival Lumière comme Sunset Boulevard sont la preuve qu’aucun cinéma, ni aucun de ses artistes ne peut mourir et (re)trouvera toujours des spectateurs.


Lumière 2023