VERMINES
Kaleb est passionné d’animaux exotiques. Un jour, il rentre chez lui avec une araignée venimeuse et la laisse accidentellement s’échapper. Les habitants de son immeuble de cité vont devoir se battre pour leur survie.
Critique du film
Vermines, c’est l’histoire d’un homme qui a laissé sa passion prendre le dessus sur sa raison, accueillant chez lui une espèce d’araignée venimeuse et incroyablement reproductive. C’est l’histoire de Kaleb, qui tente de faire le deuil de sa mère et de (sur)vivre avec sa sœur dans leur appartement délabré. C’est l’histoire de deux amis qui ne se parlent plus, d’un immeuble entier abandonné par tout un pays. Mais Vermines, c’est avant tout une histoire d’araignées. Une histoire d’horreur que le réalisateur Sébastien Vaniček et son équipe ne perdent jamais de vue.
Et quelle histoire. Oublions tout temps perdu à tenter de trop justifier un récit alambiqué et allons droit au but : les araignées sont là tout le temps, dès le début. D’abord cachées dans le sable d’un désert africain, ensuite dans les conduits d’un immeuble en décrépitude. Vermines tisse lentement sa toile lors d’une première demi-heure d’une étonnante maîtrise, nous faisant presque oublier qu’il s’agit là du premier long-métrage de son réalisateur. Sébastien Vaniček profite de ce temps de répit pour nous présenter un immeuble marqué par l’entraide et la bienveillance.
Vermines dresse le portrait d’une cité presque trop attachante. Celle-ci empêche quiconque de la quitter, le système tout entier se dressant contre ses habitants qui, malgré leurs rêves, se retrouvent entoilés dans cet immeuble crasseux et dysfonctionnel oublié par l’Etat. Grâce à des dialogues parfois touchants (et souvent hilarants, merci Jérôme Niel et son personnage caricatural à pleurer de rire), Sébastien Vaniček fait de l’ouverture de son film un tendre moment de proximité entre le spectateur et les personnages. Puis vient le chaos, matérialisé par une boîte de chaussures trouée. Un trou qui a laissé l’horreur s’échapper, une monstruosité à huit pattes de quelques centimètres.
Le règne arachnéen
Des arachnides partout, tout le temps. Comme ce système qui a laissé cette cité dépérir, elles s’immiscent dans le moindre conduit d’aération, la moindre porte entrouverte, la moindre douche. Chaque recoin se transforme en opportunité pour ces araignées voraces. Une course contre-la-montre commence dans un huis-clos haletant, n’offrant aux protagonistes que de rares moments de répit. C’était la principale difficulté d’un film sur l’une des phobies les plus courantes du monde : comment matérialiser la peur sans un nombre conséquent d’araignées ?
Un défi largement relevé par l’équipe du film, qui est parvenue à faire de ces ignobles créatures les principaux personnages du film. Parce qu’après avoir été discrètement introduites par la mise en scène intimiste de Sébastien Vaniček, les araignées se multiplient à une vitesse affolante. Sans tomber dans la démesure – on pouvait craindre des araignées de la taille de celles de La Chambre des Secrets ou du Retour du roi – Vermines nous plonge au cœur d’un rêve machiavélique sans issue. « C’est un cauchemar » répète Kaleb impuissant. Le spectateur ne peut qu’acquiescer face à un tel niveau de terreur.
Les effets spéciaux sont on ne peut plus réussis, chaque araignée paraissant plus réelle que sa voisine. En multipliant les clins d’œil et références (volontaires ou non) à des classiques de l’horreur, Alien et Gremlins en tête, Vermines propose un condensé de ce qui se fait de plus efficace dans le genre. Un voyage horrifique empreint de fureur, merveilleusement servi par un casting à la hauteur du rendez-vous. La scène de mort d’un personnage, d’abord émouvante, devient effroyablement glaçante à cause des cris d’effroi de ses proches inconsolables.
Le spectateur s’est attaché à ce quartier et aux manies de chacun. A la gardienne perfectionniste et à ses insecticides, à celle qui a enfin trouvé la porte de sortie de cette cité, à la jeune femme qui rêve d’ailleurs… Lorsque le film s’éloigne de l’horreur pure, c’est pour raconter une histoire touchante. Malgré son dernier acte un peu moins convaincant et manquant de subtilité – les vermines ne sont pas celles que l’on pense, mais nous l’avions déjà compris en cours de visionnage – Vermines est une représentation sincère et réussie de la vie de cité. Porté par une bande-son remplie de rappeurs francophones pour accentuer sa nervosité, le premier long-métrage de Sébastien Vaniček est une franche réussite.