featured_the-substance

THE SUBSTANCE

AVEZ-VOUS DÉJÀ RÊVÉ D’UNE MEILLEURE VERSION DE VOUS-MÊME ?  Vous devriez essayer ce nouveau produit : The Substance. ÇA A CHANGÉ MA VIE. Avec The Substance, vous pouvez générer une autre version de vous-même, plus jeune, plus belle, plus parfaite…  Il suffit de partager le temps. Une semaine pour l’une, une semaine pour l’autre. Un équilibre parfait de sept jours. Facile n’est-ce pas ? Si vous respectez les instructions, qu’est ce qui pourrait mal tourner ?

Critique du film

Coralie Fargeat était probablement le nom le moins attendu de la liste des cinéastes sélectionnés en compétition officielle de ce 77e festival de Cannes. Son premier film, Revenge, avait certes été largement vu et commenté lors de sa sortie en 2017, mais il avait surtout profondément divisé la critique et le public. Au visionnage de cette relecture pop, décomplexée et très graphique du genre ‘’rape & revenge’’, les spectateurs y ont perçu soit un trip féministe bas du front et cathartique, soit un exercice de style vain et lourdingue. Avec The Substance, il semblerait que la cinéaste soit déterminée à tracer sa voie dans un cinéma d’horreur sans concession, puisqu’elle s’aventure cette fois ci sur les terres du body-horror.   

Elisabeth Sparkle (un patronyme destiné à briller) est une ancienne gloire d’Hollywood. Sa carrière d’actrice semble derrière elle mais elle reste malgré tout la tête d’affiche d’une émission matinale de fitness à la Jane Fonda. Retirée de l’antenne à cause de son âge, le hasard – mais existe-t-il vraiment ? –  la met sur la route d’un jeune éphèbe qui lui apporte la solution à son problème : The Substance. Un remède miracle, sorte d’élixir de jouvence qui repousse les limites de la science. Mais un tel miracle ne vient pas sans quelques contraintes à respecter… 

Quoi de plus évident que de prendre l’attrait le plus organique du cinéma d’horreur pour parler de la quête illusoire de la jeunesse et beauté éternelles ? En cela, The Substance a tout du conte moral : une héroïne caractérisée de la manière la plus minimaliste qui soit, un choix motivé par pur pêché de vanité et les conséquences malheureuses de cet acte qui viendront dessiner une conclusion sous forme de leçon à retenir. Le procédé a ses charmes et permet à Coralie Fargeat d’entrer rapidement dans le vif du sujet. La littéralité du propos fait du film une réinterprétation souvent ludique du Portrait de Dorian Gray ; ludique, oui mais pas subtil.

The substance

Volontairement tape à l’œil, la mise en scène de Coralie Fargeat multiplie les effets outranciers en permanence. La réalisatrice file sa métaphore des dangers du culte de l’apparence dans une gradation continuelle de l’horreur qui offre des moments gores anthologiques. Le film jouit d’ailleurs d’un remarquable travail sur les maquillages et effets pratiques. La surenchère atteint des sommets de mauvais de goût dans un dernier acte chaotique et jusqu’au-boutiste qui ferait passer Darren Aronofsky pour un réalisateur de l’épure. En bref, il faut le voir pour le croire. 

Pour autant, aussi intense que soit l’expérience, difficile de pardonner au film ses nombreux défauts, à commencer par une tendance de la réalisatrice à surligner ses effets et thématiques en permanence, sous une pluie de références qui confine au name dropping. Kubrick, De Palma, Carpenter et Cronenberg sont ainsi convoqués de manière aussi arbitraire que vaine. Cela pourrait presque passer inaperçu si le film n’affichait pas 2h20 au compteur, une durée invraisemblable qui ne fait que renforcer l’aspect répétitif du dispositif, notamment à mi-parcours.

Agressif et méchant, The Substance s’apprécie avant tout comme l’énorme farce horrifique qui aura trouvé par on ne sait quel miracle un chemin jusqu’à la compétition cannoise. Il ne faut placer dans ce film bis aucune attente supplémentaire, car ce n’est ni son discours superficiel, ni ses effets tapageurs et trop référencés qui le feront entrer au panthéon des grandes œuvres du cinéma d’horreur. En revanche, on lui sait gré de nous rappeler le talent de Demi Moore. L’actrice livre ici une prestation démentielle qui, elle, ne manquera pas de marquer les esprits.

Bande-annonce

6 novembre 2024 – De Coralie Fargeat, avec Demi MooreMargaret QualleyDennis Quaid


Cannes 2024 – Compétition