MARIUS
Marius est un jeune homme que la mer exalte. Il aime son père César, bourru et bonhomme, il aime aussi la petite Fanny qui vend des coquillages devant le bar de César. Depuis son enfance, l’envie de courir le monde l’enflamme. Il lutte contre sa folie. Il ne veut pas abandonner son père qui en mourrait peut-être de chagrin, ni la petite Fanny qui ne pense qu’à lui. Et pourtant la mer est là…
Critique du film
Premier volet de la Trilogie marseillaise, Marius a été réalisé en 1931 par Alexander Korda, cinéaste hongrois déjà aguerri, mais le film a été supervisé par son auteur, Marcel Pagnol, qui s’occupa notamment de la direction d‘acteurs et qui ne réalisera officiellement son premier film que deux ans plus tard. Marius, au départ une pièce de théâtre créée en 1929, est donc porté à l’écran et fait partie des premières années du parlant cinéma en France puisque le premier français entièrement sonore date de 1929.
Beaucoup de freins, d’oppositions existaient à cette époque concernant ce projet, le cinéma sonore aussi. Beaucoup de personnes étaient nostalgiques du muet et, comme toujours face à un grand bouleversement, des craintes souvent irraisonnées surgirent. Mais le tournage de Marius, dans les studios de Joinville le pont et à Marseille pour les extérieurs allait donner lieu à un des fleurons du cinéma français.
Marius – joué par Pierre Fresnay, acteur alsacien mais tout à fait crédible en jeune marseillais – travaille dans le café de son père, César – Raimu, tout en faconde et en pudeur – et vit encore avec lui. Fanny, une jeune vendeuse de coquillages – Orane Demazis – et Marius se côtoient et semblent beaucoup s’apprécier, mais le jeune homme semble frappé d’une forme de folie, un appel de la mer qui semble irrésistible et qui agit sur lui comme un sortilège. Il en est ainsi depuis qu’il a rencontré des marins antillais qui lui ont donné le goût de l’exotisme et du voyage lointain. Fanny aime profondément Marius, qui se trouve ballotté entre des désirs contradictoires au point de ne plus savoir ce qu’il veut vraiment.
Fanny, malgré ses dix-huit, se montre moins versatile et vulnérable que Marius et connaît déjà le sens du sacrifice et de l’amour véritable qui respecte la liberté de l’autre et souhaite son bonheur. Autour d’eux, on assiste à une véritable comédie humaine, à travers des dialogues savoureux, dont certaines répliques sont passées à la postérité, des échanges de points de vue sur l’amour, des parties de cartes où règnent tricherie et mauvaise foi.
La partie de cartes justement est restée dans les annales du cinéma français, mais il y en a bien d‘autres, comme ce petit déjeuner entre un père et son fils, César et Marius. Avec des non-dits, de l’humour et beaucoup de pudeur. Et on n’est pas seulement dans la comédie avec Marcel Pagnol, mais aussi dans le mélodrame, voire même la tragédie. Autour de ces trois grands interprètes, on trouve également Fernand Charpin qui joue Panisse, un homme d’âge mûr qui s‘intéresse à Fanny et souhaiterait l’épouser. Charpin était également remarquable dans ce rôle qui pouvait sembler ingrat au départ mais dont le développement dans le film Fanny qui allait suivre ferait voir son personnage d’un œil plus nuancé.
Drôle, émouvant, Marius, reste très représentatif de ce que Marcel Pagnol écrivait et réalisait : une oeuvre poignante, drôle, tendre et pudique, sans pathos, sans surenchère mais avec une grande profondeur, beaucoup de simplicité et d’humanité. Les films de cet grand auteur, décédé il y a cinquante ans, restent vivaces, passionnants et s’adressent à toutes les générations.
Marius, tout comme dix autres films réalisés ou supervisés par Marcel Pagnol, ressortent au cinéma le mercredi 24 juillet, distribués par Carlotta Films, dans des versions restaurées par Hiventy grâce à Nicolas Pagnol, la Compagnie Méditerranéenne de Films, MK2 Films et avec le soutien du CNC.