ON AURA TOUT VU !
François Perrin a écrit le scénario de ce qu’il projette être une belle histoire d’amour platonique. Mais le projet atterrit dans les mains de Bob Morlock, qui souhaite en faire… un film pornographique. Révoltée de le voir renier ses principes, sa compagne Christine cherche un moyen de le dissuader et décide pour cela… de se faire engager sur le film.
Critique du film
François Perrin (Pierre Richard) est un photographe qui gagne principalement sa vie dans la publicité. Il a un projet de film avec Henri Mercier (Henri Guybet), qui a un poste dans une fabrique de pâtes. Lorsque Bob Morlock (Jean-Pierre Marielle, savoureux), un producteur de films pornographiques, lui propose d’apporter quelques modifications à son scénario, Perrin commence par protester, choqué et vexé. Mais l’idée de manquer une opportunité de se faire connaître, de se faire un nom dans la profession, est plus forte que tout. Après tout, il fera certainement un autre film après celui-ci et ce sera alors une œuvre sans concession. Il en est persuadé et cherche à convaincre Christine, sa fiancée (Miou-Miou) du bien-fondé de sa décision. Mais Christine n’est pas de cet avis, prend très mal le manque de fermeté de François et décide de s’en mêler.
On aura tout vu, réalisé en 1976 par Georges Lautner entre Pas de problème ! et Mort d’un pourri, part d’un synopsis fondé sur le quiproquo et un thème assez sensible à priori – le monde du cinéma pornographique – mais contient une véritable profondeur et des scènes fortes, émouvantes. Le film aurait pu reposer sur de la simple gaudriole offre même des passages assez forts, comme celui de l’audition de Christine, durant laquelle la jeune femme accepte de se mettre à nue au sens propre, mais aussi au sens figuré. En s’humiliant volontairement, la compagne de François Perrin lui envoie un signal d’alerte et un message d’amour mêlés.
Cette scène où on demande à la jeune comédienne de lire du Molière, un passage de l’École des femmes, en étant totalement nue, alors que le regard lubrique de Bob Morlock la scrute impitoyablement, montre quelle formidable comédienne est Miou-Miou et le talent d’écriture de Francis Veber ainsi que la force de réalisateur de Georges Lautner, cinéaste certes inégal, mais bien injustement sous-estimé par une certaine critique. N’oublions pas qu’outre ses plus grands succès populaires – Les Tontons Flingueurs ou Les Barbouzes, par exemple – ce metteur-en-scène a livré des œuvres aussi fortes thématiquement que Le Septième juré ou Mort d’un pourri, qui ont en commun avec On aura tout vu de traiter d’une certaine forme d’éthique, ou d’exigence morale, d’amour de la vérité ou de la justice.
On trouve également dans ce long-métrage une distribution qui comprend également Renée St Cyr, mère du réalisateur. qui joue ici une grande bourgeoise, cheffe d’entreprise, moins collet monté qu’en apparence, une partie de la troupe du Splendid – on voit d’ailleurs le fameux café-théâtre – : Michel Blanc et Gérard Jugnot dans des seconds rôles bien écrits, mais aussi Sabine Azéma. Ce film, à l’écriture fine, bien plus fine que ne pouvait le laisser penser le sujet, et à la réalisation impeccable bénéficie également d’un soin apporté aux décors, à la photographie et à la bande originale, cette dernière étant signée par Philippe Sarde. Au final, On aura tout vu constitue un divertissement original, intelligent et sensible. L’humour est bien évidemment très présent tout au long de cette histoire qui n’a rien perdu de sa pertinence.