BILAN 2021 | Les meilleurs films sur Netflix
Dans un contexte de crise sanitaire, Netflix a largement profité de la situation pour s’imposer comme un des acteurs majeurs de l’industrie – avec tout ce que cela dit de l’époque. Cette année, de grandes et belles propositions cinématographiques n’ont pas pu profiter des meilleures conditions de découverte (la salle, toujours) mais ont tout de même suscité un certain enthousiasme dans nos rangs. Voici donc notre sélection des meilleurs films sortis en 2021 sur la plateforme au grand N.
Nos coups de coeur
Pieces of a woman
Pieces of a woman reste un film d’auteur, écrit par une femme, réalisé par un homme, au message d’amour universel et qui éclaire cette question du deuil et de ce qui existe, en supplément du simple temps qui passe et atténue les souffrances, pour aider les hommes et les femmes à traiter la tristesse, au lieu de la dissimuler simplement pour paraître forts. D’où vient la force ? De celui qui contient son chagrin pour continuer à vivre ? Ou de celui qui pleure, pour vivre son chagrin. – EB
MALCOLM & MARIE
Depuis le bouleversant épisode spécial d’Euphoria, centré sur Rue, Sam Levinson témoigne d’une grande maîtrise du dialogue. De l’intimité du couple, coincé dans un engrenage universel – celui de la communication – découle un regard plus vaste sur le monde du cinéma. Deux visions s’affrontent, s’écoutent, se blessent parfois, où tout y passe. Le male gaze, l’Art comme expression de soi, la perception d’un réalisateur noir à Hollywood ou encore la critique : Malcolm & Marie navigue entre les sujets et dessine en fond une idée du cinéma, comme d’un art en perpétuel mouvement, autant qu’il questionne les identités de genre. – AD
MOXIE !
Sous couvert d’un teen movie dans l’air du temps, Moxie d’Amy Poehler invite à revoir le modèle éducatif actuel et à refuse ces « valeurs » que l’on infuse insidieusement dans l’esprit des femmes comme dans celui des jeunes hommes. Il ne s’agit finalement pas de rhabiller les filles mais bien de mieux éduquer les garçons, le problème n’étant pas que les filles (ou femmes) portent des jupes ou des débardeurs, mais bien celui que les garçons pourraient les harceler. – TP
Night in paradise
Malgré quelques bémols, il faut reconnaître l’efficacité de ce spectacle généreux, qui a le mérite de tenir sa tonalité de bout en bout, loin de ces comédies policières potaches tant appréciée en Corée du sud. Le trait est ici épais, le noir profond est presque absolu, mais l’intérêt subsiste jusqu’à la dernière seconde. Le plan final rappelle d’une certaine manière le cinéma du mexicain Michel Franco, dans un absolu des sentiments qui débouche sur le pire, voire même l’insoutenable. Cette radicalité dans le geste est à saluer, loin de tous les compromis de scénario et autres facilités pour délivrer des films plus faciles d’accès, mais bien moins intéressants que ce Night in paradise. – FB
Clair-obscur
La réalisatrice donne en fait à sa mise en scène des touches de douceur et de délicatesse qui sont en adéquation avec le jeu de ses actrices : Tessa Thompson et Ruth Negga (Loving) livrent des prestations tout en retenue mais où les apparences cachent en fait un mal-être dissimulé. Œuvre réfléchie autant sur le fond que sur la forme, Clair-obscur surprend par sa maturité pour un premier film et place incontestablement Rebecca Hall, dont on connaissait déjà les talents d’actrice, parmi les cinéastes à suivre de très près. – FG
Tick, tick… boom !
Tirant son nom d’un projet intime jamais achevé de Larson, Tick, tick… Boom ! est porté par la prestation possédée d’Andrew Garfield et l’enthousiasme de Miranda à rendre hommage à un auteur qu’il admire comme à un art qui l’habite, reflet du thème central du film : la création et ce qu’il en coûte pour porter la vision qui nous anime. Comme toute comédie musicale qui se respecte, Tick, Tick… Boom ! embrasse généreusement ses excès émotionnels (quitte à paraître un peu insistant), à l’instar de son comédien principal habité, pour illustrer la détermination sans faille de son protagoniste. – TP
The power of the dog
L’irrésistible beauté du film recèle une puissance dramatique que seule l’immensité des paysages du Montana semble pouvoir contenir. Jane Campion détricote patiemment les codes du western pour tirer son film, telle une chaman, vers un envoûtement. The Power of the Dog se goûte comme un élixir de cinéma.D’une maîtrise remarquable, le film, dans toutes ses composantes (format scope, photographie, décors naturels, prépondérance de la musique) est dimensionné pour le grand écran. – FXT
The lost daughter
Si The Lost Daughter n’échappe pas à quelques défauts classiques du premier film, il n’en reste pas moins un film extrêmement prometteur. La jeune réalisatrice défend admirablement son personnage principal en nous plaçant au cœur de ses sentiments et de ses questionnements. Pour ce faire, elle peut compter sur les solides interprétations de ses deux Lena, Olivia Colman et Jessie Buckley, qui derrière leur apparente froideur cachent une détresse déchirante. Sur une partition proche, Dakota Johnson livre également une prestation remarquable. Epaulé par la belle photographie d’Hélène Louvart aux accents mélancoliques, Maggie Gyllenhaal filme ces femmes avec une réelle bienveillance, loin du regard que le monde porte sur elles. – FG
Nos autres recommandations
Penguin Bloom
Porté avec justesse par Naomi Watts, ce mélodrame sur la reconstruction suit – certes – un sentier assez balisé mais son émotion fonctionne grâce à son interprète et la relation particulière entre la mère meurtrie et l’oiseau blessé. À l’image du symbolisme au cœur du film, Penguin bloom peut parfois manquer de subtilité, pas aidé non plus par sa voix-off et une caractérisation quasi inexistante des protagonistes secondaires. Ces gros sabots sont toutefois rendus plus pardonnables grâce à la prestation de son personnage principal mais aussi grâce à la superbe photographie de Sam Chiplin, qui offre un dépaysement bienvenu à l’heure où chacun doit se contenter de journées café-boulot-couvre feu. Une recette classique mais qui a fait ses preuves, sans une dose de sentimentalité qui l’aurait rendue écœurante, pour un mélo qui parvient à planer légèrement au-dessus de la mêlée. – TP
The dig
Malgré une réalisation académique (ce mot est assez éreintant mais on ne trouve pas d’autre terme) et une dimension esthétique plutôt terne, The Dig est un film qui a la bonne idée de se construire depuis la terre. Celle qui tache, qui s’incruste dans les ongles, qui assèche la peau. Dans cette terre se trouvent d’innombrables témoins de notre passé, d’une époque révolue. The Dig creuse dans cette histoire fascinante et nous emporte finalement dans une aventure qui a le mérite d’être suivie, un dimanche soir ou lors d’un après-midi pluvieux. – SR
La mission
Mis en scène avec savoir-faire, et porté tant par la superbe photographie de Dariusz Wolski (le chef-op des derniers films de Ridley Scott) et la partition musicale très réussie de James Newton Howard, le western de Greengrass traduit la violence de cette époque, où les femmes et les filles ne sont guère considérées. Repartis sur les chemins battus de l’histoire vraie portée à l’écran, le réalisateur et l’acteur assurent un travail de bonne facture – malgré un épilogue qui traîne un brin la patte – pour un visionnage plaisant. En l’absence d’excursion en salle obscure, La mission offrait une tranche de cinéma de qualité, avec des ingrédients – aussi traditionnels soient-ils – ayant fait leurs preuves, ça ne se refuse pas. – TP
Love and monsters
Ce coming-of-age movie entre apocalypse absurde et quête existentielle mêle assez efficacement sa touche de mélancolie et son soupçon d’optimisme, évitant en route quelques lieux communs en trouvant de nouveaux angles dans ce registre familier. Le charme de Dylan O’Brien devrait en séduire quelques un.e.s mais reconnaissons le : la vraie star de Love and monsters, c’est le chien. – TP
Oxygène
Oxygène soulève quelques questions éthiques et existentielles, mais c’est bien sa dimension thriller qui prime dans ce huis-clos porté par la prestation solide de Mélanie Laurent. Malgré sa durée, peut-être un peu conséquente pour un film à suspens qui aurait gagné à être resserré sur 90 minutes, le long-métrage d’Aja parvient à se relancer grâce à quelques rebondissements – parfois un peu faciles – pour maintenir l’intérêt jusqu’à son dénouement plutôt malin. La musique de Rob, enfin, apporte à deux reprises un peu de lyrisme et d’ampleur à cette production confinée globalement convaincante. – TP
Beckett
Beckett peut compter sur la solide performance de John David Washington (Tenet, Malcolm & Marie) pour faire tenir le film sur ses épaules et camper ce personnage tragique n’ayant quasiment plus rien à perdre au point de sauter d’une falaise. Un efficace thriller mêlant rédemption, deuil, corruption et colère sociale. – TP
Kate
Leur violence graphique, inhabituelle pour un film estampillé Netflix, garantit à Kate la dose de satisfaction nécessaire pour le regarder jusqu’au dénouement sans déplaisir. Si Kate se contente de recycler sans limite ses sources d’inspirations (l’algorithme Netflix est passé par là), le film est surtout porté par la performance explosive de Mary Elizabeth Winstead, qui renouvelle par la même occasion le rôle de la vengeuse démasquée. – PL
Comme des proies
Plutôt épuré dans sa narration, si Comme des proies ne tiendra pas la comparaison avec ses illustres aînés, il n’en demeure pas moins une excursion satisfaisante d’une heure trente pour qui aime les thrillers de survie en territoire hostile et les jeux de massacre où la menace plane dans l’ombre. Au risque de vous faire passer l’envie de programmer une randonnée dans les semaines à venir… – TP
La bataille de L’Escaut
Porté par un joli casting (dominé par Gijs Blom et son excellente interprétation quasi muette), une mise en scène de belle envergure et un scénario plutôt bien écrit, le premier film néerlandais de Netflix se place dans la moyenne haute des films de la plateforme et mérite bien qu’on lui consacre une soirée. – FG
Aya et la sorcière
Cela faisait six ans (si on excepte la co-production du sublime La Tortue rouge) que le studio Ghibli n’avait pas sorti un film, c’est dire si Aya et la sorcière était attendu. Le film intriguait d’autant plus qu’il s’agit de la première réalisation du studio en animation numérique… Si le virage technique n’est pas encore bien maîtrisé, on oublie rapidement cette lacune devant le bonheur enfantin que procure Aya et la sorcière, qui n’a par ailleurs pas perdu en chemin l’esprit si particulier du studio Ghibli. – FG
Don’t look up
Du point de vue de la comédie, Don’t Look Up peut s’avérer brouillon mais contient l’intégralité du spectre humoristique de son auteur. Mais c’est le traitement unidimensionnel des seconds rôles qui fait surtout mouche. Il faut dire que McKay semble n’avoir rien perdu de sa verve comique et se révèle à nouveau comme un brillant directeur d’acteurs : tous les acteurs appuyant le duo principal tirent leur épingle du jeu et dévoilent d’emblée une situation aussi statique que leurs motivations et psychologies. Le choix de certaines coupes ou raccords malicieux permettent d’autant plus au film de ne pas essouffler son tempo, quitte à parfois se réinventer pour amener les situations dans un absurde impossible à deviner, sans que le tout ne s’enfonce, de ce point de vue, dans le cynisme le plus frelaté. – TB