BILAN | Nos films du mois d’octobre 2019
Chaque mois, les membres de la rédaction vous proposent leur film du mois, celui qu’il fallait découvrir à tout prix en salle ou dans votre salon (sorties SVOD, e-cinema…). Découvrez ci-dessous les choix de chaque rédacteur de Le Bleu du Miroir pour le mois de octobre 2019.
Le choix de Thomas Périllon
Absent du palmarès de Cannes 2019, Sorry we missed you ne l’a été certainement que parce que son précédent, le déchirant Moi, Daniel Blake, a remporté la Palme d’Or. Car, plus que jamais, Ken Loach attire l’attention sur ce qui se trame insidieusement dans la société actuelle et livre un portrait émouvant, engagé, richement documenté et d’une justesse implacable d’une famille qui souffre sous le poids d’une économie pesant contre elle. Quand la génération actuelle semble consentir à la servitude d’un système capitaliste qui répand ses illusions entrepreneuriales, celle qui arrive bientôt sur le marché du travail questionne : à quoi bon faire des études si c’est pour finir écrasé par les dettes et prisonnier de sa propre condition ?
(PS : Allez voir Pour Sama)
Le choix de Amandine Dall’Omo
Dans un format carré étouffant et une caméra à l’épaule tremblotante, Oleg nous place dans la position inconfortable de voyeur. Enfermé avec son personnage, venu de Lettonie pour tenter sa chance à Bruxelles, le film se mue lentement en un cauchemar claustrophobe, et fait émerger une réalité dont on ne peut plus détourner le regard : celle de l’esclavagisme moderne.
Le choix de Florent Boutet
Révélée chez Claire Denis il y douze ans dans 35 rhums en tant qu’actrice, Mati Diop a fait des débuts tonitruants avec son premier long-métrage en tant que réalisatrice en remportant le Grand prix à Cannes cette année, au sein d’une compétition particulièrement relevée. Soucieuse de représenter l’Afrique et le Sénégal loin des clichés et de l’appropriation culturelle qui ont, selon ses mots, abimée ses peuples, Mati Diop raconte une histoire qui ne ressemble à aucune autre. Porté par un personnage féminin fort, Ada, jeune femme promise à un mariage de raison avantageux financièrement, Atlantique démontre la difficulté d’être une femme libre dans une société qui aliène toujours autant la moitié de sa population, démontrant les difficultés d’exercer son libre arbitre. À l’instar de Rouge impératrice de Léonora Miano, roman phare de la dernière rentrée littéraire, Mati Diop matine son histoire d’ésotérisme, les esprits côtoyant les vivants, dans une symbiose qui s’auto-alimente, influant sur le cours des événements. Coup de maître inaugural, Atlantique marque la naissance d’une autrice majeure, dont la mise en scène brille, et où chaque détail nourrit une vision cinématographique rafraîchissante.
Le choix de Fabien Randanne
À travers ses personnages, le film scrute le jeu des masculinités (Qu’est-ce qu’être un homme? Qu’est-ce que cela implique par rapport au regard de la société ? …) et raconte une histoire d’amour dont la force a quelque chose du romantisme adolescent.
Le choix de Paul Hébert
Partant de la délicate naissance du désir adolescent, le dernier film de Sono Sion nous plonge dans un chaos grotesque et sublime, sorte de tragédie shakespearienne chimérique, variant les tons et les formes, et tutoyant l’horreur avec grâce. The Forest of Love est un film qui rince les yeux de l’ordinaire, témoignage brillant du génie apocalyptique de son auteur. Énorme.
Le choix de Julian Bocceda
Après son escapade hollywoodienne ratée, Dolan se met au film de potes et ça lui réussit plutôt bien. Imparfait mais terriblement attachant, Matthias et Maxime emballe par son énergie, dans un style plus apaisé.
Le choix de François-Xavier Thuaud
Le premier long métrage de Mati Diop est une prodigieuse réussite. Ses fils narratifs nourris aux genres et légendes racontent une histoire d’aujourd’hui et de toujours. Une histoire de tour érigée et de salaire exigé. Une histoire de soleil mouillé et de feu sans étincelle. À bas bruit, le film décrit l’ardeur d’Ada à ne pas abdiquer. Admirable de bout en bout (pas un seul plan n’est anodin), le film est porté par une direction artistique totalement cohérente. Il faut noter la splendide photographie de Claire Mathon, éclatante et douce, crue et sensuelle qui révèle et protège à la fois. Tel le ruban de Moebius, Atlantique, par une simple torsion, envoûte à jamais.
Le choix de Céline Bourdin
On parle souvent de l’urgence de filmer mais elle aura rarement été aussi imposante que dans « Pour Sama ». À la fois témoignage déchirant d’une femme voyant ses semblables être massacrés et déclaration d’amour d’une mère à sa fille, le film est d’une puissance éprouvante, vissé à une réalité qui bouleverse. Peu diffusé, il mériterait un plus large retentissement et une mise en lumière plus forte tant il apparaît comme un film essentiel et nécessaire.
Le choix de Fabien Genestier
Le choix de Charline Corubolo
Le choix de Florent Dufour
Hal Ashby est un paradoxe à lui tout seul : probablement l’un des cinéastes les plus importants des années 70, mais aussi et malheureusement le plus méconnu d’entre tous. Ce documentaire de Amy Scott tombe donc à point nommé pour mettre enfin en lumière ce réalisateur iconoclaste, auteur d’une décennie quasi parfaite parsemée de multiples chefs-d’oeuvre tels que Harold & Maud, La Dernière Corvée, En Route pour la Gloire et Bienvenue Mister Chance. L’histoire d’une ascenscion irrésistible avant une triste chute dans les années 80, une nouvelle décennie avec laquelle il n’était définitivement pas en phase. Avec ce film poignant et bourré d’entretiens passionnants, au pire vous aurez envie de découvrir le cinéma de Hal Ashby – et au mieux, vous aurez envie d’aimer encore plus le cinéma de Hal Ashby.
Le choix de Eric Fontaine
Porté par l’interprétation magnifique de Luca Marinelli (coupe Volpi à la dernière Mostra de Venise), le film de Pietro Marcello restitue toute la richesse et la beauté du roman de Jack London. Ce film tout en nuances, teinté de poésie et d’onirisme, offre une très belle méditation sur la condition humaine, l’écriture et l’amour. Un film intemporel et sans esbroufe.
Le choix de Samuel Regnard
Le choix de Kévin Cattan
Lion D’Or à la Mostra de Venise, Joker s’imposait forcément comme un challenger de taille à la course aux Oscars. Pas d’aspect super-héroïque ici, Todd Phillips joue avec la culture populaire pour dresser le portrait de son anti-héros. Et si le film peut parfois être dangereux (beaucoup trop d’actes causés par le protagoniste sont justifiés), ça n’en reste pas moins un grand morceau de pellicule, magnifié par une mise en scène aux allures « Scorsesiennes » – on pense évidemment à Taxi Driver, Mean Streets et La Valse Des Pantins – et par un Joaquin Phoenix dans l’un de ses plus grands rôles. Couillu – certains pourront cependant y voir de l’inconscience – de faire un film pareil en 2019.