CANNES 2018 | Qui aura la Palme d’Or ? Notre palmarès et nos pronostics.
Thierry Frémaux l’avait annoncé en conférence de presse le mois dernier : cette 71ème édition allait célébrer l’ouverture d’une nouvelle décennie riche en changements après un soixante-dixième anniversaire marquant la fin d’une ère et le début d’une autre. Face à une Sélection Officielle hétéroclite, transformée en véritable vivier d’auteurs, on ne peut que saluer une prise de risques payante ayant vu des cinéastes novices ou confirmés imposer leur style et leur empreinte avec force et conviction. Particulièrement élevé cette année, le niveau des mises en scène a démontré la belle santé d’un cinéma en perpétuelle réinvention. L’adjonction de sang neuf parmi des réalisateurs fidèles de la Croisette a, de plus, permis de relancer des débats passionnés en suscitant la curiosité pour des longs-métrages moins exposés qu’à l’accoutumée.
Une femme en pôle pour la Palme d’Or ?
À l’heure du palmarès, quelques prétendants se dégagent aujourd’hui du peloton et dessinent, au loin, une première idée de ce que pourraient être les préférences de Cate Blanchett et de son jury. Il est ainsi fort probable que cette 71ème édition soit enfin celle où une femme rejoindra Jane Campion, seule réalisatrice palmée à ce jour pour La Leçon de piano. Alors que tout le monde voyait Alice Rohrwacher (avec Heureux comme Lazzaro) très bien placée dans la course à la récompense suprême, Nadine Labaki est venue redistribuer les cartes en toute fin de festival avec Capharnaüm, très sérieux candidat réunissant tous les ingrédients d’une Palme d’or. Le jury cédera-t-il à ce choix du consensus, quasiment assuré de devenir un grand succès public ?
En embuscade, il faudra compter sur un cinéma asiatique très prolifique ayant rythmé ces douze journées de compétition. Revenu au sommet, Lee Chang-Dong aura une belle carte à jouer avec le mystérieux Burning, à l’instar d’Hirokazu Kore-Eda (Une Affaire de famille), à nouveau très inspiré par ses thématiques familiales chéries. Récompenser deux cinéastes comme Kirill Serebrennikov et Jafar Panahi, assignés à résidence dans leurs pays respectifs, serait également la marque d’un choix politique fort. Tandis que le premier a ébloui en début de festival avec le magnifique Leto, le second s’est employé à réciter toujours plus justement sa singulière petite musique dans Trois Visages. Plus aléatoire mais toutefois possible, le retour de Spike Lee (BlackKklansman), toujours enragé, pourrait bénéficier de quelques soutiens de taille dans le jury qui serait bien avisé de récompenser un film en écho avec nos actuelles préoccupations sociétales.
Et pour le reste du palmarès ?
Les deux grands habitués du festival auront également leur mot à dire dans le reste du palmarès. Il est, en effet, presque certain que l’on retrouvera l’acteur de Matteo Garrone, Marcello Fonte, auréolé d’un prix d’interprétation pour Dogman tandis que Nuri Bilge Ceylan (Le Poirier Sauvage) pourrait bien compléter sa collection avec un joli prix du scénario. Chez les interprètes féminines, la bataille sera rude mais on peut tout à fait songer à une récompense pour l’actrice d’Ayka, Samal Yeslyamova, ou à une potentielle surprise avec les sacres moins évidents de Joanna Kulig (Cold War) ou Zhao Tao (Les Éternels). Si l’on espère encore un sursaut de dernière minute pour En Guerre ou Plaire, aimer et courir vite, on imagine, en revanche, beaucoup moins Yomeddine, Everybody Knows, Le Livre d’image, Les Filles du Soleil (sauf en cas d’un prix-surprise pour Golshifteh Farahani), Asako et Un Couteau dans le cœur au palmarès face à des concurrents aussi imposants.
Palmarès personnel
Palme d’or : Leto, de Kirill Serebrennikov
Grand Prix : Burning, de Lee Chang-Dong
Prix d’interprétation masculine : Marcello Fonte pour Dogman de Matteo Garrone
Prix d’interprétation féminine : Samal Yeslyamova pour Ayka de Sergey Dvortsevoy
Prix de la mise en scène : Le Poirier sauvage, de Nuri Bilge Ceylan
Prix du scénario : Une Affaire de famille, de Hirokazu Kore-Eda
Prix du jury : Plaire, aimer et courir vite, de Christophe Honoré
Pronostics
Palme d’or : Capharnaüm, de Nadine Labaki
Grand Prix : Heureux comme Lazzaro, de Alice Rohrwacher
Prix d’interprétation masculine : Marcello Fonte pour Dogman de Matteo Garrone
Prix d’interprétation féminine : Samal Yeslyamova pour Ayka de Sergey Dvortsevoy
Prix de la mise en scène : Burning, de Lee Chang-Dong ex-aequo avec En Guerre de Stéphane Brizé
Prix du scénario : Le Poirier Sauvage, de Nuri Bilge Ceylan
Prix du jury : Trois Visages, de Jafar Panahi