COMME UN AVION
Michel, la cinquantaine, est infographiste. Passionné par l’aéropostale, il se rêve en Jean Mermoz quand il prend son scooter. Et pourtant, lui‐même n’a jamais piloté d’avion… Un jour, Michel tombe en arrêt devant des photos de kayak : on dirait le fuselage d’un avion. C’est le coup de foudre. En cachette de sa femme, il achète un kayak à monter soi‐même et tout le matériel qui va avec. Michel pagaie des heures sur son toit, rêve de grandes traversées en solitaire mais ne se décide pas à le mettre à l’eau. Rachelle découvre tout son attirail et le pousse alors à larguer les amarres.
Échappée belle.
On pourrait croire le thème de la crise existentielle et de la parenthèse de vie éculé, tellement les films sur le sujet se sont succédé ces dernières années. C’était vrai, jusqu’à ce que Bruno Podalydès s’en empare et en fasse une ode à la vie, à l’hédonisme et aux rêves d’enfant, alliée à un soupçon de gravité en arrière plan.
Bruno Podalydès, qui s’offre pour la première fois le rôle titre d’un de ses films (et ce n’est sûrement pas un hasard), est donc Michel, un cinquantenaire passionné d’aéropostale depuis sa plus tendre enfance, mais qui semble devenu presque étranger au monde qui l’entoure. Un jour, il tombe sur des photos d’un kayak en bois qui lui rappelle le fuselage d’un avion. C’est alors l’électrochoc, l’étincelle qui fait remonter à la surface tous ses rêves d’enfants. Il décide alors de partir à l’aventure comme ses idoles de l’aéropostale, en se laissant porter par le courant d’une rivière jusqu’à, peut-être, rejoindre la mer. Mais rien n’est moins sûr…
Le film tient justement dans ce flottement, dans cette idée de prendre la vie comme elle vient, de suivre son coeur. L’écriture et la mise en scène de Bruno Podalydès suivent le même mouvement, l’auteur/réalisateur laissant son imagination l’emporter là où bon lui semble, tout en conservant une harmonie parfaite. Il y a de l’humour, beaucoup d’humour, dans Comme un avion, du jeu d’esprit au burlesque en passant par la subtilité de blagues cachées au second plan. Mais Bruno Podalydès, fidèle à lui-même, y ajoute une poésie enfantine, une fantaisie délicieuse et énormément de cœur. Le réalisateur atteint peut-être ici le sommet de ce qui est devenue sa qualité première, arriver à nous faire rire et nous toucher en même temps, parfois même au détour d’une même scène (comme lors des rêves du héros, drôles car saugrenus, émouvants car nous ramenant à nos propres divagations).
Si Bruno Podalydès nous offre une magnifique fable bucolique et solaire, il n’hésite pas, en arrière plan, à conserver une pointe de sérieux. Car le propos du film reste bien de parler d’un homme d’une cinquantaine d’année s’étant laissé emporter par le courant des années et de la vie d’adulte, mais n’ayant jamais vraiment oublié l’enfant qui sommeille en lui. Un homme en crise, en quête de réponses mais sans vraiment savoir quelles questions se poser. Il les trouvera, peut-être pas forcément où il croyait, et vivra une parenthèse enchantée, qu’il ne quittera que lorsqu’il se sera retrouvé. Le dernier plan du film, lourd de symbole, est sur ce point absolument magnifique.
Si Comme un avion est particulièrement réussi sur le plan scénaristique et de la mise en scène, on ne peut cependant pas parler d’un film de Bruno Podalydès sans évoquer son casting. L’auteur est clairement un réalisateur à comédiens, et s’il s’octroie ici le premier rôle qu’il tient parfaitement, son film doit également beaucoup à ses autres interprètes. À commencer par les trois rôles féminins tenus par des Sandrine Kiberlain, Agnès Jaoui et Vimala Pons solaires, sensuelles et émouvantes. Les seconds rôles masculins se partagent quant à eux la voix de la raison (Denis Podalydès) et le comique burlesque (Michel Vuillermoz, Jean-Noël Brouté et Pierre Arditi, mémorable).
Loin des grosses comédies françaises produites à la chaine, Comme un avion est la preuve que le cinéma d’humour français existe encore et qu’avec des artisans du rêve comme Bruno Podalydès, il n’est pas prêt de s’éteindre. N’attendez plus, embarquez à bord !
La fiche
Bonjour, l’histoire m’a laissée assez indifférente. Je suis restée sur la rive. Bonne après-midi.
Déçu, ça tourne trop en rond. Résultat c’est clairement le film de Bruno P. le moins abouti
Quel film a-t-il fait qui soit abouti ? 🙂
Dommage que tu n’aies pas réussi à embarquer dans ce beau voyage…
Effectivement, le film fait son chemin assez lentement dans une sorte de parenthèse, de flottement, mais pour moi ça ne tourne pas en rond.
Les films de Podalydès sont des bulles remplie de poésie éphémère , peu importe qu’ils soient totalement aboutis ou non. Moi j’aime ce genre de petits films plein de légèreté, partant un peu dans tous les sens (mais avec une vraie cohérence dans celui-ci, ce qui n’était effectivement pas forcément le cas dans d’autres).
B. Podalydès pour jus. Parfois répétitif et longuet, souvent très drôle avec un sens du poétique. Rafraichissant en plein cagnard.
J’ai beaucoup aimé, vraiment ! Ce n’est pas long ni lent à partir du moment où l’expectative prend toute sa forme. Il faut avoir l’esprit réceptif, autant que le personnage principal pour dériver, s’arrêter, suspendre le temps, prendre un autre envol, et ainsi de suite…
Vraiment, film très touchant, qui rend un certain hommage aux éléments, et qui permet à notre kayakiste d’être dans le dépassement de soi même.
La note vibrante en fin de film est la célèbre » Vénus » d’Alain Bashung, dignement bien choisi pour clôre le voyage… Juste sublime.
Un régal… Je voudrais absolument retrouver la partition de l Alleluia joué à la guitare dans le film… Merci à celui ou celle qui me rendra ce service !
Je suis plutôt d’accord, après effectivement « il faut avoir l’esprit réceptif » au cinéma de Podalydès.