AMANDA
Paris, de nos jours. David, 24 ans, vit au présent. Il jongle entre différents petits boulots et recule, pour un temps encore, l’heure des choix plus engageants. Le cours tranquille des choses vole en éclats quand sa sœur aînée meurt brutalement. Il se retrouve alors en charge de sa nièce de 7 ans, Amanda.
Critique du film
Mikhaël Hers est un réalisateur dont les films, souvent empreints de mélancolie et de subtilité, explorent des thèmes de la mémoire, de la perte et des relations humaines dans des contextes contemporains. Ayant fait ses armes avec des œuvres comme Memory Lane (2012) et Ce sentiment de l’été (2015), Hers se distingue par sa capacité à aborder des sujets graves avec une approche douce et mesurée. Son film Amanda, qui aborde le deuil et la reconstruction après un attentat, s’inscrit parfaitement dans cette veine, où les drames personnels se dessinent sur fond de grands bouleversements sociaux.
Le cœur du film se situe dans la relation entre David (interprété par Vincent Lacoste, parfait) et sa nièce Amanda (Isaure Multrier, sensationnelle). Ce jeune homme de 24 ans, en apparence détaché, voit sa vie bouleversée après la mort de sa sœur dans un attentat terroriste. Ce traumatisme brutal va l’amener à prendre la responsabilité de sa nièce, une petite fille de 7 ans. C’est au sein de cette relation qu’Hers niche l’essence de son film : une exploration subtile de l’adversité, du passage à l’âge adulte et de la manière dont la vie peut se reconstruire après la perte d’un être cher.
L’émotion du film est avant tout portée par sa retenue. Hers ne cherche pas à en faire trop, ni dans le traitement de la tragédie ni dans la dramatisation des sentiments. Le réalisateur fait le choix de filmer des scènes longues et contemplatives, où les émotions se manifestent plus par les silences et les gestes que par des dialogues explicites. Cela confère au film une grande dignité, où chaque regard échangé ou geste attentionné entre David et Amanda devient lourd de sens. La lente évolution de leur relation – du désarroi à la création d’un nouveau lien familial – est d’autant plus poignante dans ce cadre minimaliste.
Le traitement de l’attentat, qui sert de catalyseur au drame, est un autre point d’intérêt du film. Mikhaël Hers ne cherche pas à exploiter l’événement comme un ressort spectaculaire, mais plutôt à le montrer comme un événement invisible, un traumatisme qui résonne dans le quotidien des personnages sans être constamment évoqué. Les conséquences de cette effroyable tragédie, à travers les réactions de David et Amanda, sont traitées avec beaucoup de pudeur, mais aussi avec une grande sincérité. Ce n’est pas un film qui cherche à dramatiser l’événement, mais plutôt à en explorer les répercussions sur les individus qui doivent continuer à vivre après la catastrophe. Cela confère à Amanda une profondeur émotionnelle qui dépasse le simple fait divers.
La prestation de Vincent Lacoste dans le rôle de David est tout simplement remarquable. Il réussit à rendre son personnage à la fois fragile et résilient, un homme qui, tout en restant dans une forme de retenue, lutte avec ses propres limites émotionnelles tout en essayant d’offrir à Amanda la stabilité dont elle a besoin. Lacoste parvient à transmettre une gamme d’émotions subtiles avec une économie de moyens, son jeu étant toujours juste, sans jamais tomber dans l’excès.
Face à lui, Isaure Multrier incarne Amanda avec une douceur et une sincérité qui touchent profondément. La jeune actrice déploie toute une palette d’émotions sans jamais forcer, sa performance étant d’une grande justesse. Son personnage, à la fois orphelin et enfant, est un pivot autour duquel gravite toute l’intrigue. L’évolution de la relation entre l’oncle et la nièce, à la fois timide et forte, s’ancre dans les gestes quotidiens, les petits moments d’attention et de compréhension mutuelle, qui deviennent le cœur battant du film.
La prestation de Stacy Martin, qui incarne la compagne de David, apporte également une dimension supplémentaire au film. Dans un rôle plus discret mais tout aussi essentiel, elle parvient à insuffler à son personnage une douceur et une empathie qui viennent compléter la dynamique complexe entre les personnages.
Avec Amanda, Mikhael Hers signe un film sobre et poignant qui ne cherche jamais à en faire trop pour atteindre le spectateur. Le cinéaste capture la profondeur des émotions humaines à travers une narration fluide, soutenue par des interprétations exceptionnelles. Au-delà de la perte et du deuil, il livre un mélodrame magnifique, délicat et profondément humain sur la manière dont un homme et une enfant, après un événement dramatique, peuvent se redécouvrir et se reconstruire dans la douceur et la tendresse.
Bande-annonce