COUNTDOWN
Countdown est une application qui vous révèle le temps qu’il vous reste à vivre. Lorsque Quinn (Elizabeth) la télécharge sur son smartphone, elle découvre qu’elle ne lui reste plus que trois jours avant de mourir. D’abord sceptique, elle apprend ensuite que plusieurs personnes sont mortes à la seconde même où le compteur de l’appli affichait zéro sur leur téléphone. Déterminée à échapper à son sinistre destin, Quinn va essayer de faire mentir Countdown par tous les moyens possibles.
La critique du film
Sur le papier, l’idée-concept de Countdown est séduisante. En effet, le smartphone est aujourd’hui le medium privilégié (pour ceux ou celles qui peuvent s’en payer un) par lequel circule l’information, peut-être la plus grande richesse de nos sociétés contemporaines, pour le meilleur et pour le pire. Aussi redéfinit-il notre quotidien, usant de son pouvoir d’attraction afin de transformer notre curiosité en addiction potentiellement aliénante.
L’idée d’écrans noirs tissant (dangereusement) le fil de nos vie n’est pas nouvelle. Elle a même été considérablement explorée et questionnée par la série Black Mirror, qui au travers de ses différents épisodes a même prédit certaines dérives de notre rapport actuel à la technologie. Le smartphone deviendrait alors un filtre incontournable de la réalité, un monolithe de poche source d’un divertissement pascalien sophistiqué, et possiblement horrifiant. C’est l’intention de Countdown que de représenter cet objet comme le moteur dramaturgico-horrifique de son récit.
Le film ne fait pas rien de son concept en termes de mise en scène. Quelques idées sont même bien senties, dans la mesure où elles arrivent à subvertir la banalité du smartphone en de vrais enjeux horrifiques : l’angoisse de l’application qui ne se supprime pas, le virus transformé en malédiction, les push rappelant l’heure de notre mort, les conditions d’utilisation transformées en pacte démoniaque, ou bien encore la sonnerie source de jumpscares. Il y a donc d’une part un phénomène d’actualisation technologique de la malédiction fantastique, et d’autre part, l’inscription de la technologie dans une mythologie fantastique archaïque. Dès lors, le smartphone devient le réceptacle démoniaque d’un enjeu existentiel universel, à savoir la tentation de connaître l’heure de notre mort. Ceci constitue une forme de connaissance ultime, car elle peut tout simplement nous révéler que notre vie n’est qu’une tragédie.
Une appli qui tue ?
Cela fait particulièrement sens dans un film d’horreur, dans la mesure où certaines figures narratives ont un destin (mortifère) tout tracé : rares sont les jeunes adolescentes qui, au début d’un slasher, arrivent à survivre à leur agresseur masqué. Ces personnages sont tragiques, car nous savons dès le départ qu’ils ne survivront pas. Mais le film de Justin Dec essaie de transgresser cette règle en posant les questions suivantes : si ces victimes connaissaient par avance l’heure de leur mort, pourraient-elles s’en sortir ? La conscience de sa propre finitude peut-elle permettre de modifier son destin ? Cette connaissance est-elle un pouvoir, ou un fardeau ?
Ces idées sont passionnantes, mais leur potentiel est malheureusement annihilé par la platitude du film dans lesquelles elles essaient de se déployer. La caractérisation des personnages est d’une superficialité parfois navrante (mention spéciale au personnage de Matt, qui, hormis peut-être une scène, ne sert strictement à rien dans le récit), et le caractère réflexif du film l’amène à une ironie de petit malin aussi gênante que programmatique (le jeune geek comme réinventation de la figure du prêtre, c’est non).
Le film essaie à tout prix d’être à la mode, notamment au travers de son discours sur le harcèlement au travail, mais là encore, toutes les scènes abordant le sujet ne servent strictement à rien d’un point de vue dramaturgique. Presque comme si le sujet avait été mis là pour faire beau, réduit à une intention marketing assez cheap. Globalement, chaque enjeu pouvant potentiellement nous intéresser est expédié à la va-vite, sans aucune subtilité. Le film n’est pas spécialement désagréable à regarder, mais déçoit dans sa paresse narrative et visuelle, sous-exploitant radicalement son concept potentiellement vertigineux.