CRÉPUSCULE
Le corps de la petite Anna, huit ans, est découvert au fin fond d’une forêt. Deux inspecteurs sont dépêchés sur place pour mener l’enquête et retrouver le dangereux tueur en série qui a déjà sévi deux fois dans la région. Lorsque leur unique suspect met fin à ses jours, les enquêteurs décident de partir sur une nouvelle piste, s’aidant pour cela d’un dessin de la dernière victime…
Critique du film
La scène d’ouverture de Crépuscule consiste en un long survol de paysages forestiers, alors que sourd une musique angoissante. Un couple apprend la mort de sa fille de huit ans, sauvagement assassinée. La femme ne peut contenir sa douleur qui s’exprime de façon insoutenable et l’homme, également, ne peut plus se contrôler. Ainsi commence le premier film de György Fehér, réalisé en 1990 et qui évoque à la fois le cinéma de Belà Tarr – ils ont beaucoup travaillé ensemble – et celui d’Andreï Tarkovski. Commence alors une enquête, une recherche de l’assassin.
Riche de longs plans séquences donnant à l’ensemble un caractère hypnotique, Crépuscule constitue une expérience indicible, qui pourrait ne pas susciter l’adhésion. Mais si on accepte de se laisser embarquer, de s’abandonner à son rythme particulier, de s’affranchir de toute notion de réalisme pour pénétrer dans un univers de sensations, on a alors affaire à une sorte de cauchemar éveillé, un voyage aux tréfonds de l’âme humaine. Le fait qu’on ne puisse situer l’histoire dans le temps accentue cette impression d’irréel et d’étrangeté.
La caméra scrute inlassablement très longuement les visages des interprètes, dont le jeu habité et intense constitue un des atouts majeurs de cette œuvre. Ce style si particulier que les spectateurs des films de Belà Tarr connaissent bien prend très vite le pas sur l’histoire. György Fehér, avant de réaliser ce premier long-métrage avait beaucoup œuvré pour la télévision et Crépuscule porte la marque d’une grande maitrise cinématographique. Ce réalisateur hongrois mit en scène un second long-métrage de cinéma en 1998, Passion, puis décéda en 2001.
Ce film, inspiré par un roman policier de l’écrivain Friedrich Dürrenmatt, « La Promesse » – également adapté par Sean Penn en 2001 avec The Pledge – était resté inédit en France, mais avait été présenté dans plusieurs festivals, notamment à Locarno où il avait remporté le Léopard de Bronze.
12 juin 2024 – De György Fehér, avec Péter Haumann, János Derzsi, Judit Pogany