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DE SANG-FROID

Le 14 novembre 1959. Une journée ordinaire pour les Clutter. Herb, un agriculteur qui a prospéré à force de travail et de volonté, sa femme Bonnie, à la santé fragile, et leurs enfants, Nancy et Kenyon, 16 et 15 ans, forment une famille aimée et respectée de tous à Holcomb, Kansas. À quelques heures de route, Perry Smith, la trentaine, des velléités artistiques mais déjà cabossé par la vie, tout juste sorti de prison, va retrouver un ancien codétenu, Dick Hickock, qu’il admire pour son charme et son bagout. Cette nuit-là, le destin de ces six êtres sera inéluctablement lié et scellé car les deux complices s’apprêtent à commettre le plus odieux des crimes. Et rien ne sera plus jamais comme avant.

Noir c’est noir

Réalisé par Richard Brooks en 1967, après toute une série de longs-métrages très différents, les deux précédant celui-ci étant plutôt des films d’aventure spectaculaires et en couleurs – Lord Jim en 1965 et Les Professionnels en 1966 – De sang-froid constitue une adaptation extrêmement fidèle au livre de Truman Capote sorti l’année précédente, que l’auteur mit cinq ans à écrire et qu’il considérait comme « a non fiction novel », à savoir un roman de non-fiction. Richard Brooks a écrit et réalisé un film à l’image du livre, totalement fidèle à son esprit.

Très impliqué dans la production, Richard Brooks tient tête à la Columbia qui voudrait lui faire tourner son film en couleurs et lui imposer Paul Newman et Steve McQueen dans les rôles des deux meurtriers. Le réalisateur veut deux inconnus pour jouer les deux protagonistes principaux pour rendre plus crédible l’histoire et jouer sur la peur que peuvent inspirer Dick et Perry. Car pour Richard Brooks, c’est un film sur la peur et celle-ci ne peut être distillée que par une œuvre en noir et blanc et des visages peu familiers.  Il engage donc deux quasi débutants Scott Wilson et Robert Blake qui s’avèreront excellents.

Voulant faire de la réalité le pilier de son film, Richard Brooks montre une fois de plus son perfectionnisme habituel. L’authenticité est recherchée jusque dans les détails. Certains personnages sont interprétés non pas par des acteurs mais par les vrais protagonistes, comme le tailleur ou certains jurés. Certains lieux, dont la maison du crime, sont également ceux de la véritable histoire. Tous ces éléments contribuent à faire de De sang-froid une œuvre d’autant plus forte que les faits sont exposés d’une façon clinique et que les meurtres ne nous seront détaillés que sous forme de flashbacks, après avoir longuement appris à connaître les deux criminels et leurs failles, en particulier pour Perry Smith, ce dernier ayant noué avec Truman Capote une relation presque amicale lors de son séjour en prison quand l’écrivain venait lui rendre visite régulièrement. De sang-froid n’est nullement un réquisitoire contre la peine de mort. Richard Brooks, en cinéaste humaniste et respectant l’intelligence des spectateurs, laisse toute liberté à ces derniers de se forger une opinion sur la Loi du Talion d’état. 

A la mise en scène au cordeau, qui tire toute sa force d’un refus du spectaculaire, de la dramatisation excessive et de tout jugement moral, viennent s’ajouter une photographie superbe de Conrad Hall qui prend toute son ampleur avec le cinémascope et la partition remarquable de Quincy Jones qui contribuent à l’exceptionnelle réussite plastique du film, dont la fin glaçante constitue une des plus fortes de l’histoire du film noir. Une œuvre forte et percutante, à la fois grand film noir et réflexion sur la criminalité et le châtiment.


Disponible dès le 28 avril chez Wild Side en combo Blu-Ray /DVD, accompagné de suppléments et d’un très beau livret – texte rédigé par Philippe Garnier et photos. 

Détails des suppléments : Larmes noires à Holcomb (39’) : Patrick Brion revient sur le film et sa genèse / De sang froid  Richard Brooks raconte (18’) : entretien pour l’émission Cinéma Cinémas / Contrebasses pour un massacre (30’) : la musique originale de Quincy Jones, par Stéphane Lerouge / Un livret, écrit spécialement par Philipe Garnier et illustré de photos d’archives

Extrait

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