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DOMAS LE RÊVEUR

Le petit Domas peut s’endormir n’importe où : la tête posée sur un bureau d’écolier, sur un banc public, ou même dans une cave sur une pile de matelas. C’est qu’il essaye par tous les moyens de retrouver dans ses rêves un mystérieux général qu’il a rencontré un après-midi au bord d’un lac. Ses camarades de classe, fascinés par l’histoire de ce général font tout pour lui faciliter le sommeil. Il se heurtera à un mauvais garçon qui ne cessera de lui jouer de mauvais tour.

Critique du film

Sorti en 1973, Domas le rêveur est un film autour de l’enfance, sujet cher au réalisateur lituanien Arunas Zebriunas, qui avait déjà tourné La Jeune fille à l’écho en 1964 et La Belle en 1969. Comme pour ses précédentes œuvres, ce sujet constitue également la possibilité, à travers une histoire pleine de candeur et de poésie, d’échapper à la censure soviétique. Domas est un petit garçon attachant et timide, qui aime jouer et rêver comme beaucoup d’autres enfants de son âge. Mais cette propension au songe lui fait parfois confondre la réalité et un monde imaginaire. Souvent ennuyé par un camarade plus fort que lui, qui le harcèle en compagnie d’un complice, Domas ne sait pas forcément se défendre. Un jour qu’un de ses jouets, un avion, va se perdre dans un lac, un homme d‘âge mûr lui sauve son aéroplane et lelui remet. Comprenant qu’il s’agit d’un général, l’imagination débordante de Domas ne fait qu’un tour. Les rêves de l’enfant reprennent de plus belle. Et le jeune garçon s’endort partout, même en classe, provoquant l’intérêt de ses camarades, mais aussi d’une petite fille, Zita, qui se montre protectrice avec lui. Même pour son entourage, les rêves de Domas commencent à prendre une importance de plus en plus grande, quitte à inquiéter certaines personnes.

Drôle et tendre, ce long-métrage d’Arunas Zebriunas déploie une palette de très belles images, qu’il s‘agisse des scènes où l’enfant est éveillé, ou des scènes oniriques dans lesquelles la chlorophylle devient curieusement rouge et où l’enfant rêve souvent de batailles, du général ou de grenades explosives qui poussent sur les arbres. Domas dort avec près de son lit un char d’assaut, qui trône comme un jouet fétiche. L’image de la guerre, de l’armée et d’une certaine forme de propagande ou de goût pour la normalité viennent parsemer le film, qui évoque avec subtilité l’époque soviétique. Domas et son père, un artiste aussi rêveur que lui apparemment, doivent allez chez le médecin, car ils sont différents de la norme, pas en phase avec la pensée du régime. Ce qui nous vaut entre autres une scène assez savoureuse chez le médecin conseil, assez peu orthodoxe et plutôt sympathique, décalé, qui leur préconise des séances de yoga. Cette complicité avec ce père marginal mais très humain nous donne quelques beaux moments attendrissants. 

« Quand grandiras-tu ? Vous êtes les mêmes ! » dit la mère de l’enfant au père de celui-ci, irritée par tant d’insouciance, mais aussi de décalage par rapport aux attentes d’une société corsetée. On trouve un autre personnage attachant en la personne d’une vieille dame, attentive et indulgente envers les enfants et leur monde intérieur. Le monde que dépeint le réalisateur offre des soupapes, à travers le rêve bien sûr, mais aussi en la personne d’individus bienveillants qui viennent contrebalancer la dureté de la réalité et d’un « camarade » de classe harceleur ou du manque de tendresse d’une mère peu compréhensive. Comme tous les films réussis et marquants sur l’enfance, Domas le rêveur ne nous parle pas seulement de cette période de la vie et s’adresse à tous les publics. 

Bande-annonce

25 décembre 2024 –  De Arūnas Žebriūnas, avec Darius BratkauskasDaiva DauyetiteArturas Vegis