DRIVE-AWAY DOLLS
Jamie et son amie Marian sont à la recherche d’un nouveau départ, elles se lancent dans un road trip mais les choses tournent mal lorsqu’elles croisent en chemin un groupe de criminels bras cassés.
CRITIQUE DU FILM
En 2021, l’annonce de la séparation des frères Coen avait créé un certain émoi chez tous les amateurs de cinéma. Il faut dire que ces deux-là font partie des rares cinéastes à trouver grâce aux yeux du grand public aussi bien qu’à ceux des cinéphiles les plus passionnés. Mais c’est ainsi, les réalisateurs à l’origine d’œuvres culte comme Fargo ou The Big Lebowski ont décidé, du moins pendant un temps, de faire cavaliers seuls. Joel a été le premier à franchir le pas de l’expérience solo en 2022 avec sa relecture stylée de The Tragedy of Macbeth. Difficile d’évaluer le succès public de cet essai, le film n’étant sorti que sur Apple TV+. Néanmoins, il ne semble pas avoir trouvé le même statut qui auréolait n’importe quel autre film réalisé avec son frère.
C’était donc logiquement au tour d’Ethan de passer derrière la caméra, et c’est un projet co-écrit avec Tricia Cooke qui aura ses faveurs. Drive Away Dolls est décrit comme le premier volet d’une « trilogie de série B lesbienne (sic) » et voit le jour après avoir dormi longtemps dans un tiroir, son écriture remontant à de longues années, d’après Cooke. Outre les présences des valeurs montantes que sont Beanie Feldstein et Margaret Qualley, le casting alléchant se compose également de Matt Damon, Miley Cyrus et Pedro Pascal qui passent une tête lors de courtes apparitions. Alors, avec un Coen à la barre, une formule bien rodée de comédie noire aux accents subversifs et de jeunes actrices en vue, qu’est-ce qui pourrait clocher ? Et bien à notre grande surprise, à peu près tout.
Nul ne sait ce qui a pris à Ethan Coen de passer à l’acte avec la réalisation de ce film. La crise de la soixantaine ? L’envie d’être « cool » ? Et si Tricia Cooke n’avait pas révélé être lesbienne, leur film aurait même des procès en queerbating tant nombre de motifs homosexuels de cette histoire semblent gratuits, lourdauds ou prétextes à des scènes qui frisent le racolage. Parfois, ça lorgne subtilement sur Fargo et The Big Lebowski, comme pour se rappeler les valeurs sûres ou conférer à Drive Away dolls un peu de leur substance, mais rien n’y fait, ça sent le réchauffé et ça tombe à côté.
Par ailleurs, Margaret Qualley, qui a pourtant fait ses preuves auparavant dans des films dramatiques, est loin d’être la révélation comique espérée. Au final, on assiste à un ratage embarrassant, jamais drôle et dont on se demande même s’il a pu l’être à l’époque de son écriture. Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, c’est ringard et sans éclat. Espérons que le couple soit plus inspiré pour la suite de cette trilogie, dont le deuxième opus entre en tournage prochainement. Alors que les frères Safdie ont eux aussi annoncé une séparation professionnelle, on serait tenté de leur montrer Drive Away Dolls, dans l’espoir que ce film serve de spot préventif visant à empêcher les combos gagnants de se séparer.
Bande-annonce
3 avril 2024 – D’Ethan Coen, avec Margaret Qualley, Geraldine Viswanathan