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EN ATTENDANT BOJANGLES

Camille et Georges dansent tout le temps sur leur chanson préférée, Mr Bojangles. Chez eux, il n’y a de place que pour le plaisir, la fantaisie et les amis. Jusqu’au jour où la mère va trop loin, contraignant Georges et leur fils Gary à tout faire pour éviter l’inéluctable coûte que coûte.

Critique du film

La Côte d’Azur, Romain Duris, un montage très dynamique et beaucoup de blagues en quelques secondes. On se croirait revenu dans L’Arnacoeur de Pascal Chaumeil sorti il y a déjà onze ans. En lieu et place de Vanessa Paradis, c’est Virginie Efira qui lui donne la réplique, dans une romance burlesque qui commence tambour battant, multipliant les scènes de comédie pour faire un public convaincu d’être face à un film léger et drôle. Le réalisateur, Régis Roinsard, avait déjà utilisé cette recette de la comédie dans Populaire (2012), déjà avec Romain Duris. Ce chapiteau fermement planté, les rails de la comédie vont pourtant sérieusement dérailler au bout de cette première demi-heure qui nous promettait beaucoup de fous rires.

Installé à Paris, le couple fantasque devient une famille avec la naissance de leur fils Gary, toujours dans un élan romanesque intense. Demeure bourgeoise, train de vie à l’avenant, l’édifice ne se lézarde qu’au bout de dix ans, comme une longue redescente d’une ivresse beaucoup trop importante. Les excentricités du couple deviennent inquiétants, leur fils est déscolarisé pour des motifs ubuesques, le mari vent son garage pour ne plus quitter l’appartement, et l’épouse aux multiples prénoms présente des signes de folie de plus en plus inquiétants. On quitte alors le registre du burlesque pour celui du drame.

Cette rupture complète de ton s’accompagne néanmoins de petites scènes où les personnages ne veulent pas renoncer à leur univers fantasmagorique fait d’histoires comme celles qu’on raconte aux enfants le soir pour qu’ils s’endorment. Désemparé, le mari, pour ne pas sombrer lui aussi, tente tout ce qui est en son pouvoir pour sauver ce qui peut l’être, remettant une pièce dans la machine et générer de nouvelles aventures plus colorées encore que celles qu’il avait pu inventer au début de l’histoire. Pour faire « revenir » sa femme, il réinvestit son costume de Superman, assumant jusqu’au bout leurs différences, quitte à littéralement bâtir un château en Espagne.

L’écriture du film est donc plutôt réussie ; de drôle elle devient touchante, et même très émouvante dans son final, ne négligeant aucun des détails qui avaient été semés sur le chemin comme des petits cailloux pour retrouver son logis. Il est néanmoins dommage que les personnages secondaires existent si peu, notamment celui du sénateur interprété par Grégory Gadebois, limité à un ou deux gimmicks. Tout le poids du film repose sur les trois membres de cette famille si particulière, jusqu’à quelque peu étouffer le spectateur dans un rythme qui ne ralentit pas malgré le changement drastique de tonalité.

Ces bémols mis à part, En attendant Bojangles, du nom de la célèbre chanson que joue en boucle le personnage de Virginie Efira, est un film réussi et abouti dans son projet. C’est avec une belle habileté qu’il manie les styles et renouvelle son récit, se permettant beaucoup d’audaces pour suivre les désirs de sa famille de prédilection. Film hybride, qui navigue dans beaucoup d’eaux parfois contraires, il se joue des codes pour inventer quelque chose de frais et de très plaisant qui permet à son auteur de se réinventer loin de Populaire. Son casting impeccable y est pour beaucoup dans la transmission d’une légion d’émotions qui devraient en faire un joli succès lors de sa sortie au début de l’année 2022.

Bande-annonce


5 janvier 2022 – De Régis Roinsard

avec Romain Duris, Virginie Efira et Grégory Gadebois.


Présenté en séance spéciale au Festival International de La Roche-sur-Yon

LRSY2021