FAUTE D’AMOUR
Boris et Genia sont en train de divorcer. Ils se disputent sans cesse et enchaînent les visites de leur appartement en vue de le vendre. Ils préparent déjà leur avenir respectif : Boris est en couple avec une jeune femme enceinte et Genia fréquente un homme aisé qui semble prêt à l’épouser… Aucun des deux ne semble avoir d’intérêt pour Aliocha, leur fils de 12 ans. Jusqu’à ce qu’il disparaisse.
Ice storm.
Petit à petit, Andreï Zviaguintsev est devenu l’une des ces figures qui compte au sein du paysage cannois après y avoir présenté, ces dernières années, tous ses films (sauf Le Retour) en compétition. En trois longs-métrages, le réalisateur russe n’est ainsi jamais reparti de la Croisette les mains vides, glanant, tour à tour, le prix d’interprétation masculine (Le Bannissement, 2007), le prix du jury (Elena, 2012) et, plus récemment, le prix du scénario (Leviathan, 2014). Il ne serait donc pas totalement incongru d’imaginer que Faute d’amour, son nouveau film projeté en début de festival, puisse compléter cette collection en récoltant, au passage, un prix de la mise en scène quasiment réclamé à chaque plan.
Point de départ de cette 70ème édition, Loveless (« Sans amour ») vient confirmer la lente descente d’Andreï Zviaguintsev vers un cinéma de la surenchère, formellement cadenassé, prisonnier d’une épaisse couche de glace impossible à briser. Désormais friand d’une symbolique surchargée et d’une succession de travellings avant oppressants, il semble avoir laissé s’envoler toute subtilité dans l’énième peinture d’une société piégée par son égocentrisme, réduite à néant par des adultes paraissant s’accrocher désespérément à un bateau qui n’en finit plus de prendre l’eau. Le réalisateur y fait s’affronter un homme et une femme en pleine tourmente, deux monstres d’amertume voués à répéter leurs erreurs ad vitam aeternam en engendrant les victimes de leur immobilisme.
À distance, Andreï Zviaguintsev les filme au sein de cadres à l’écrasante maîtrise et les regarde sombrer peu à peu sous le poids cruel du manque d’amour. Las, son impressionnante mise en scène et sa sublime photographie ne font naître qu’une admiration froide face à un courant d’air. On regrette alors que la puissance d’une seule séquence (un corps ravagé par les pleurs) ne parvienne à embraser le film en le propulsant hors d’un cliché du cinéma d’auteur trop fréquemment attendu, trop souvent resservi.
La fiche
FAUTE D’AMOUR (LOVELESS)
Réalisé par Andrey Zvyagintsev
Avec Maryana Spivak, Matvey Novikov, Andris Keishs…
Russie – Drame
Sortie : 20 septembre 2017
Durée : 107 min