INDIANA JONES ET LE CADRAN DE LA DESTINÉE
1969. Indiana Jones s’apprête à tirer sa révérence. Après avoir passé plus de dix ans à enseigner au Hunter College de New York, l’estimé professeur d’archéologie est sur le point de prendre sa retraite et de couler des jours paisibles dans son modeste appartement, où il vit seul désormais. Tout bascule après la visite surprise de sa filleule Helena Shaw, qui est à la recherche d’un artefact rare que son père a confié à Indy des années auparavant : le fameux cadran d’Archimède, un appareil qui aurait le pouvoir de localiser les fissures temporelles. En arnaqueuse accomplie, Helena vole l’objet et quitte précipitamment le pays afin de le vendre au plus offrant. Indy n’a d’autre choix que de se lancer à sa poursuite. Il ressort son fedora et son blouson de cuir pour une dernière virée.
Critique du film
Assurément l’un des événements de l’année et de cette 76e édition du festival de Cannes, Indiana Jones et le cadran de la destinée arrivait avec un certain niveau d’attente chez les fans du plus célèbre archéologue du cinéma, quinze ans après un 4e volet (Royaume du Crâne de Cristal) qui avait particulièrement divisé. Présenté en première mondiale sur la Croisette, avec pour l’occasion un hommage spécial à son illustre interprète Harrison Ford, ce cinquième et ultime volet devient son baroud d’honneur sur grand écran.
Confiée à James Mangold (Le Mans 66, Walk the line), qui a montré par le passé ce dont il était capable à la barre de grosses productions, cette dernière aventure s’ouvre sur une séquence qui ne manquera pas de chatouiller la fibre nostalgique des mordus de la franchise. Grâce au de-aging, Harrison Ford retrouve ses traits d’antan dans ce prologue situé en pleine seconde Guerre Mondiale, alors qu’Hitler est sur le point de perdre la guerre. Après l’arche perdue au début du conflit, le dictateur nazi souhaitait mettre la main sur la Lance de Longinus (le couteau utilisé pour prélever le sang du Christ). La tâche est confiée au scientifique Jürgen Voller mais l’objet, qui n’est au final qu’une vulgaire réplique, est également convoité par le Pr. Jones et son fidèle acolyte Basil Shaw. Ce dernier remarque que les nazis ont en leur possession une relique bien plus précieuse : la moitié du cadran d’Archimède, qui permettrait de maitriser le temps en localiser les fissures temporelles.
Près de vingt-cinq ans plus tard, Indiana Jones a perdu de sa superbe et se contente désormais de dispenser des cours à l’université. Alors qu’il s’apprête à prendre sa retraite, après dix ans d’enseignement à New York, le professeur d’archéologie reçoit la visite inattendue de sa filleule, la fille de Basil qu’il n’a plus vue depuis une nuit agitée lors de laquelle il a récupéré le demi-cadran en promettant de le détruire. Mais Helena Shaw souhaite-t-elle vraiment résoudre la quête de feu son père ? Ne joue-t-elle pas un double jeu ? Malgré leurs intérêts en apparence divergents, Indy et Helena vont s’allier pour contrecarrer les plans de Voller, qui n’a pas dit son dernier mot pour mener à bien le projet nazi.
Cette association de circonstances est probablement la meilleure idée d’Indiana Jones et le cadran de la destinée. Si leurs prises de becs récurrentes pimentent certaines séquences et permettent de dépeindre le héros comme l’homme âgé, esseulé et rempli de remords qu’il est désormais, la présence de sa filleule insuffle une nouvelle dynamique en plus d’offrir enfin un véritable personnage féminin de qualité à la saga. Déterminée, maligne et cultivée, elle est bien souvent celle qui fait avancer l’action, porteuse des savoirs et encore en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels.
On l’espérait, on le devinait, Phoebe Waller-Bridge n’avait certainement pas accepté ce rôle pour se contenter d’être une simple demoiselle en détresse. Même si cela chagrinera probablement les fans de Ford, il faut bien avouer que l’actrice britannique lui vole la vedette la majeure partie du temps. Plutôt habilement écrit, son personnage hérite du tempérament ludique d’Indy, un choix cohérent puisque la franchise a toujours cherché la légèreté dans un divertissement efficace. On regrettera peut-être simplement que le scénario ne soit pas aussi brillant qu’elle ne l’est. En pilotage automatique, avec quelques clins d’oeil typiques de la maison Disney qui a fait du fan-service son crédo à chaque tentative de résurrection d’une saga, Indiana Jones et le cadran de la destinée ne profite en revanche pas vraiment de la présence de Mads Mikkelsen en grand « villain » de cet épisode d’adieu, ne faisant rien du magnétisme du comédien pour ne proposer qu’une énième version générique du méchant nazi à lunettes.
Même si les ingrédients traditionnels de la saga sont bien présents (la quête d’un artéfact aux capacités extraordinaires, le soupçon de surnaturel, le combat acharné contre les forces fascistes) bien que deux-tiers des séquences d’action se déroulent en territoire urbain (là où la saga nous avait habitués aux grands espaces exotiques), cet ultime chapitre forcément testamentaire laisse la désagréable impression de ne pas prendre beaucoup de risques, si ce n’est une certaine modernisation de quelques éléments de la série et une dernière demi-heure où le récit tente le tout pour le tout, quitte à laisser plus d’un spectateur circonspect sur son siège.
Bâti sur des fondations nostalgiques rassurantes, si Indiana Jones et le cadran de la destinée n’a rien du ratage artistique complet et remplit globalement sa mission, il n’offre toutefois pas le bel épilogue épique et émouvant que le célèbre aventurier aurait mérité.
Bande-annonce
28 juin 2023 – Avec Harrison Ford, Phoebe Waller-Bridge, Mads Mikkelsen