JUST CHARLIE
La ficheRéalisé par Rebekah Fortune – Avec Harry Gilby, Scot Williams, Mark Carter…
Grande-Bretagne – Drame – Sortie : 15 mai 2019 – Durée : 99 mn
Synopsis : Charlie vit à Tamworth, une petite ville anglaise où tout le monde se connaît. C’est un adolescent destiné à un bel avenir dans le football et son père voit en lui le professionnel qu’il n’a jamais pu être. Mais Charlie se retrouve tiraillé entre le désir de répondre aux attentes de son père et le fait qu’il se sent emprisonné dans le corps d’un garçon. En proie à une crise identitaire, la relation précieuse qu’il avait alors avec son père se dégrade et c’est tout son univers qui est sur le point de basculer, y compris sa future carrière de footballeur. Sa volonté de découvrir sa véritable identité, va bouleverser l’équilibre de sa famille et celui de ses amis.
La critique du film
La quête de son identité est l’un des défis majeurs des adolescents, dans cette période transitoire de l’enfance à la vie d’adulte. S’accepter et être accepté est un combat existentiel qui peut parfois devenir plus ardu, lorsque le corps que l’on a ne correspond pas forcément à l’image de qui l’on est. Cette dissociation est vécue très difficilement par les personnes souffrant d’une dysphorie de genre, qui devient d’autant plus problématique à l’adolescence. Dans cette époque où chacun est pourtant encouragé à s’exprimer et devenir ce qu’il désire être, l’histoire de Charlie résonne d’autant plus fortement. Et l’art s’affirme alors comme le medium idoine pour mettre en lumière ces récits intimes. Comme le poignant Girl de Lukas Dhont, Just Charlie de Rebekah Fortune le réalise formidablement.
Soumis à une certaine pression de la part de ses parents, et en particulier de son père qui voit en lui son alter-ego qui pourrait réussir là où il a échoué, plutôt que de devenir à son tour un ouvrier peinant à boucler les fins de moi, Charlie a du mal à aimer la vie qu’on lui destine. Malgré son amour et un talent certain pour le ballon rond, dans son for intérieur, Charlie ne se sent pas comme un garçon et, petit à petit, son identité s’affirme plus nettement. Et lorsque son besoin de transition se fait persistant, Charlie doit alors lutter non seulement pour être accepté par les siens, mais également par ceux qui l’entourent dans la ville. Pour sa première réalisation, Rebekah Fortune réussit très habilement à trouver l’équilibre entre le ressenti de Charlie et la manière dont réagissent ses proches, faisant place autant à l’individu qu’à la communauté, deux partis indissociables.
Bonne Fortune
Et pour porter la charge émotionnelle du parcours de Charlie, Fortune a pu s’appuyer sur la belle prestation de Harry Gilby, qui tient ici son premier rôle principal. Scot Williams qui incarne le père de Charlie est également formidable, peinant à accepter la réalité telle qu’elle est et non pas comme il voudrait qu’elle soit. Ouvrir son esprit à d’autres possibilités n’est jamais tâche aisée et celui-ci amène une véracité supplémentaire au personnage. Patricia Potter, la mère de famille, apparaît comme un soutien, prête à défendre inconditionnellement ses enfants. Un mot enfin pour le coach, bienveillant au-delà de toutes espérances, qui en quelques actes et phrases (en apparence) anodins peut aider Charlie à emprunter ce chemin de l’acceptation sans forcément sacrifier sa passion.
Avec sobriété et délicatesse, Rebekah Fortune a signé un premier long-métrage touchant, abordant avec empathie les luttes (internes ou externes) que nous menons tous, évitant l’écueil du chemin de croix moralisateur sur l’inclusion.