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LA PAMPA

Willy et Jojo sont amis d’enfance et ne se quittent jamais. Pour tuer l’ennui, ils s’entraînent à la Pampa, un terrain de motocross. Un soir, Willy découvre le secret de Jojo.

Critique du film 

Qu’elle ait pour point d’ancrage un souvenir ou une idée, l’écriture d’une fiction se nourrit toujours du vécu de son auteur. Peut-être parce que le travail d’écriture impose une prise de recul lorsqu’on se retrouve face à ses propres mots, offrant ainsi la possibilité de se questionner, en tant qu’individu, sur leur justesse. La Pampa, premier long-métrage d’Antoine Chevrollier (Oussekine) n’est pas un film autobiographique. Pourtant, le film s’ancre dans les souvenirs intimes de son réalisateur. C’est dans son village natal, à Longué-Jumelles, en Anjou, que se déroule La Pampa. Au-delà des décors, la fiction emprunte à la réalité l’essence de son territoire rural et isolé. 

La Pampa, qui porte bien son nom, désigne le théâtre du récit : un club de moto-cross, qui dans la jeunesse du cinéaste, hébergeait la première manche du championnat de France de supercross. Discipline symbolique des codes d’une masculinité et d’une virilité exacerbées, le moto-cross est aussi l’un des éléments qui contribue à la dimension sensorielle du film. Autour de cet épicentre se dessinent des trajectoires, celles de familles et d’amis, mais aussi des émois, des violences et des injustices. 

Le cinéaste filme en premier lieu une très belle amitié, celle de Willy et Jojo (les très touchants Sayyid El Alami et Amaury Foucher). La mise en scène de leur relation est si dépourvue d’artifices qu’elle semble profondément ancienne et sincère. La justesse de ce lien qui unit Willy et Jojo se retrouve aussi dans les autres relations montrées à l’écran. En partant du point de vue de Willy, La Pampa considère chacun de ses personnages avec beaucoup d’intelligence et de pudeur, dévoilant juste ce qu’il faut de leurs failles ou de leurs parts d’ombre, sans être bavard. 

Le film aborde ainsi les ravages de l’homophobie, mais aussi la question du déterminisme social en faisant basculer le récit vers la tragédie, sans jamais forcer l’émotion. Lorsque le personnage de Marina (Léonie Dahan-Lamort) explique à Willy que le terme apocalypse ne désigne pas, étymologiquement parlant, la fin du monde, mais plutôt la révélation, la fin d’un monde, on prend conscience de l’une des plus grandes forces de La Pampa. Sans se contenter d’un coming-of-age, le film met en images un bouleversement à travers différents points de vue et son impact sur ses personnages, quels que soient leurs âges. Généreux dans l’écriture et préférant une dimension sensorielle à l’abus d’émotions artificielles, La Pampa reste en tête et nous donne envie de découvrir les prochaines histoires qu’Antoine Chevrollier aura à nous raconter. 


5 février 2025 – De Antoine Chevrollier, avec Sayyid El AlamiArtusAmaury Foucher


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