LE MONDE D’HIER
Elisabeth de Raincy, Présidente de la République, a choisi de se retirer de la vie politique. À trois jours du premier tour de l’élection présidentielle, elle apprend par son Secrétaire Général, Franck L’Herbier, qu’un scandale venant de l’étranger va éclabousser son successeur désigné et donner la victoire au candidat d’extrême-droite. Ils ont trois jours pour changer le cours de l’Histoire.
Critique du film
Après le remarqué Un Français, sorti en 2015 et traitant du monde de l’extrême-droite à travers l’évolution sur plusieurs années d’un skinhead (Alban Lenoir, présent également dans Le monde d’hier), Diastème propose un film dans un contexte politique brûlant, la Présidentielle n’étant qu’à quelques jours. Pour son réalisateur, le film est né peu après l’élection de Macron, d’une double réflexion : le constat de virages politiques inquiétants de plusieurs pays (Brésil, Etats-Unis ou encore Turquie), et l’affaire Fillon, qui avait écarté le candidat à la Présidentielle de 2017 dans les derniers instants de la campagne.
Au delà du réel
Diastème propose donc – une fois n’est pas coutume – de filmer une France gouvernée par une Présidente de la République, plutôt centriste et qui ne compte pas se représenter. La caméra la suit avec rythme dans ses déplacements officiels, apartés avec son équipe, mais aussi dans des moments plus intimes comme avec sa fille ou son Secrétaire Général, en off. L’intrigue se déroulant sur quelques jours, à la manière d’une tragédie, est ponctuée de moments que la mise en scène transforme presque en chorégraphie pour les protagonistes, souvent agrémenté d’une composition de musique classique qui rajoute parfois un peu trop de pathos. Mais surtout, Le monde d’hier questionne – en omettant volontairement d’apporter des réponses – les méthodes à employer pour tenter d’endiguer le scandale et empêcher un candidat d’arriver au pouvoir. Le scénario offre ainsi des pistes de réflexion plutôt intéressantes, sans être révolutionnaires.
Valse avec la Présidente
Pour camper le rôle de la Présidente de la République, Léa Drucker impose une certaine autorité naturelle visible, qu’on aurait cependant aimé être mieux exploitée. Le film montre également une Présidente physiquement malade mais qui le cache à son peuple, à la manière d’un Mitterrand à la fin de son second mandat. Là encore, on regrettera que le film soit trop en surface là où il aurait aurait gagné à apporter plus de sincérité et de réel face à la maladie.
Parmi la cour de la Présidente, Benjamin Biolay se démarque clairement en Premier Ministre lessivé et lassé de sa fonction et de la politique même. Si Denis Podalydès assure son rôle sans faire d’étincelles en Secrétaire Général, on retiendra également le petit rôle savoureux de politique d’une autre époque tenu par Jacques Weber. En revanche, le film semble pêcher sur le personnage du garde du corps de la Présidente, joué par Alban Lenoir, qui n’en ressort qu’une sorte de caricature.
Pour ne pas risquer l’indigestion politique, Le monde d’hier est déconseillé à celles et ceux que la campagne actuelle épuise déjà. Pour les amateurs du genre, il pourra les satisfaire. On regrettera cependant que le film demeure un peu monocorde, et qu’il reste en surface de ce qu’il présente.
Bande-annonce
30 mars 2022 – De Diastème, avec Léa Drucker, Denis Podalydès et Alban Lenoir.