LE NID FAMILIAL
Pendant que son mari Laci est parti faire son service militaire, Irén s’est installée avec sa petite fille Krisztike dans l’appartement exigu des beaux-parents. Elle doit quotidiennement subir les remontrances du chef de famille qui l’accuse de tous les maux. Lorsque Laci revient de l’armée, elle se met à la recherche d’un appartement mais essuie refus sur refus. La cohabitation devient de plus en plus dure et le couple commence à battre de l’aile…
Critique du film
Le Nid familial est le premier film de Béla Tarr, tourné en quelques jours seulement en 1977, faisant partie du mouvement appelé Réalisme Socialiste. L’un des personnages principaux, Irén, est jouée par Laszlone Horvath, une non professionnelle. De l’ensemble de l’interprétation et de ce tournage effectué dans une certaine urgence naît une grande impression de naturel ; on croirait voir un documentaire sur le Hongrie communiste avec des conversations qui semblent prises sur le vif et les conditions de vie déprimantes des habitants.
Le Nid familial débute par la description d’un jour de paie dans une fabrique de charcuterie. Les salariés sont contrôlés à la sortie. On arrive dans un appartement où commence une dispute et où pleuvent les reproches. Une femme veut s’installer à Budapest pour s’amuser : il y a là-bas Maisons de la Culture, cinémas et pâtisseries… Neuf personnes vivent dans le même petit appartement. Cette espèce de promiscuité tape sur les nerfs de tout le monde. Le grand-père, toujours à ressasser sur l’époque passée durant laquelle « c’était mieux », râle et inonde des reproches ses trois enfants et sa belle-fille. On comprendra plus tard pourquoi tant de ressentiment envers sa bru.
Plutôt que de signer une critique frontale du système en place, Béla Tarr, à travers la vie quotidienne de ses personnages, de leurs espoirs, mais aussi de leurs frustrations et de leur aigreur, nous fait comprendre la dureté de leur existence, morne, sans horizon et particulièrement contraignante.
Le Nid familial comporte de très beaux passages avec des monologues d’Irén et de son compagnon, entre autres. Scènes où leur désillusion, leur désespoir éclate non sans une certaine pudeur. La scène où les personnages se rendent à la fête foraine, espérant un monde et une vie meilleure, exprimées par une chanson populaire en musique de fond, constitue un moment d’une grande émotion. Il s’agit d’une œuvre dont le pessimisme peut paraître extrême mais qui n’a rient de plombant ou de lénifiant, grâce à une image en noir et blanc sublime, une réalisation où les plans séquences apportent une ambiance, un rythme très particuliers.
Bande-annonce
6 avril 2022 – De Bela Tarr, avec Laszlone Horvath, Laszlo Horwath, Gábor Kun