LE PRÉSIDENT ET MISS WADE
Critique du film
Alors que son dernier film, Being The Ricardos, vient d’obtenir trois nominations aux Oscars (pour les interprétations de Javier Bardem et Nicole Kidman, ainsi que J.K Simmons en second rôle), Aaron Sorkin voit l’un de ses premiers faits d’armes être remis sous la lumière des projecteurs. Le Président et Miss Wade, réalisé par le prestigieux Rob Reiner, ressort en vidéo grâce à Rimini Films et va permettre au public de redécouvrir une comédie romantique synthétisant l’Oeuvre de Sorkin. En imaginant la romance naissante entre le président des États-Unis (Michael Douglas) et une lobbyiste écologiste (Annette Bening), ce troisième film écrit par le scénariste vénéré (après Des Hommes d’honneur et Malice) est un véritable guide pour quiconque souhaiterait connaître davantage son univers.
Dès lors que les premières notes du thème d’ouverture se font entendre, la ferveur patriotique de Sorkin s’expose à mesure que le générique avance. Tandis que la composition musicale de Marc Shaiman (fidèle collaborateur de Rob Reiner) s’envole, les figures présidentielles légendaires apparaissent tels des signes d’héritage laissés à un pays et un homme. Un homme éponyme puisque le titre du film apparaît alors : The American President. Plus évocateur que son titre français, qui va préférer axer son appellation vers la romance du film, ce titre dévoile alors l’intention de Sorkin : raconter par la fiction les coulisses de la vie politique américaine. Et pour se faire, il va alors faire reposer ces grandes responsabilités sur un seul homme, le président Andrew Shepard incarné par Michael Douglas.
En suivant le quotidien constamment mouvementé de ce héros pas comme les autres, Sorkin esquisse les traits de sa série-culte À La Maison Blanche (on retrouve d’ailleurs Martin Sheen qui fait déjà apparaître des airs du président Bartlet). Les moments d’épiphanies présidentielles seront de mise, Sorkin n’hésitant pas à exploiter cela pour incarner une ferveur patriotique sans pour autant tomber dans la naïveté. À travers une idéalisation qui n’est pas sans rappeler celle de Capra dans Mr Smith Au Sénat, on observe alors une vie rythmée par d’incessantes réunions, dialogues avec l’opposition politique ainsi que la presse d’évènements soudains auxquels des décisions difficiles doivent être prises et une camaraderie mise à rude épreuve mais jamais ébranlée. Le Président et Miss Wade préfigure ce que nous connaîtrons plus tard de l’oeuvre de Sorkin, mais il serait profondément injuste de ne pas dire quelques mots sur celui qui nous aura réalisé ce film : Rob Reiner.
On le cite peu mais Reiner fait partie de ces artisans du cinéma qui savent habilement se réapproprier une histoire pour la mettre en œuvre à l’écran et offrir du divertissement de qualité. On connaît sa passion pour Stephen King et ses adaptations de Stand By Me et Misery mais Le Président et Miss Wade marque sa deuxième collaboration avec Sorkin après Des Hommes d’Honneur au début des années 90. Variant les genres à travers sa filmographie (du thriller horrifique à la comédie dramatique), il hybride le récit politique de Sorkin et la fait incarner par une comédie romantique élégante. Tous les codes sont présents ; comme par exemple celui d’un rapport à la limite de l’antagonisme entre les deux protagonistes principaux en guise de première rencontre (Sydney Wade clamant ce qu’elle pense de la politique du président Shepard sans savoir que celui-ci se trouve derrière son dos) ; sans que cela paraisse trop appliqué. Les traits de la fiction apparaissent mais ne gomment pas la candeur romantique laissée par le formidable couple incarné par Douglas et Benning.
Le Président Et Miss Wade se regarde non seulement comme une préfiguration d’une oeuvre majeure de la fiction américaine contemporaine, mais également comme une comédie romantique somptueuse qui souhaite faire rejaillir en ses spectateurs de la candeur.