LES VEDETTES
Critique du film
Une mise en abyme audacieuse pourrait permettre de comparer Les vedettes à un gigantesque zapping comique, puisant dans de nombreuses références du genre afin de diversifier le rire du spectateur. Dans ce film, les chaînes de télévision diégétiques défilent comme les références apparaissent à l’écran : on y croise autant « Nicolas & Bruno » (le personnage de Daniel ressemble à un chanteur démodé tel Gilles Gabriel dans La personne aux deux personnes) que Quentin Dupieux ou Adam McKay. Même s’il est bâti sur un rythme plus décousu que leur premier projet cinématographique La folle histoire de Max et Léon, leur nouveau-né est un gigantesque melting-pot d’humour plutôt bien digéré, dans le sens où il parvient à faire dérailler ses références pour pousser les ressorts comiques vers d’autres horizons inattendus.
Il faut dire que la tendresse ressentie immédiatement envers les protagonistes et cet amas d’influences colossales permettent au film d’expérimenter dans un champ bien plus large que la sempiternelle critique de la télévision facilement visible dans le récit. Que l’on ne s’y méprenne pas : quelques dialogues et quelques personnages sont là pour pointer du doigt un odieux envers du décor du PAF. Néanmoins, cette partie reste rachitique et ne s’amuse pas à explorer l’évidence critique des effets pervers de la médiatisation. Il est justement intéressant de constater que le sel thématique ne se retrouve pas beaucoup dans un regard de petit malin sur les médias. L’intérêt semble plutôt se porter vers l’idée de se servir du monde audiovisuel comme climax émotionnel et moral des deux personnages aussi manipulés que manipulateurs.
A l’instar de Frangins malgré eux, dont l’héritage se ressent d’emblée, Les vedettes permet plus de traiter de deux beaux idiots et leurs multiples pérégrinations dans une diégèse remplie de personnages égocentriques et cyniques, parfois loin des studios où sont enregistrés les parodies visibles au fil des minutes. Une émancipation salvatrice qui évite les écueils comiques dans lesquels quelques-uns de leurs maîtres ont malheureusement sombré au fil de leurs longs-métrages.
Malgré tout, il faut admettre quelques inconvénients à la démarche artistique générale du projet. Comme les précédents formats courts du trio composé de Jonathan Barré, Grégoire Ludig et David Marsais, Les vedettes est articulé autour et seulement autour de la présence monstrueuse du duo devant la caméra. Le choix tranché du film est identique aux quelques « Very Bad Blagues » qui ont fait la réputation du Palmashow : seconds rôles réduits au minimum syndical, punchlines tranchées qui doivent toutes être définitives et performances des deux acteurs principaux comme seules garanties de réussite du long-métrage.
Si certains points parviennent à être bien surmontés – les personnages « soutenant » les protagonistes sont écrits juste ce qu’il faut pour ne pas devenir des vulgaires pions dépourvus d’intérêt et rares sont les blagues qui tombent vraiment à l’eau -, d’autres sont bien moins convaincants. Le plus visible est le grand déséquilibre de qualité de jeu entre Grégoire Ludig et David Marsais. Si le premier nommé, bourru et mégalomane, réussit haut la main à décrocher de grands moments de rire, son acolyte semble avoir plus de mal à suivre et paraît transparent même lors de ses temps forts. Néanmoins et malgré ces bémols, le nouveau cru du Palmashow reste une comédie de très bonne facture et mérite une petite attention en salles.
Bande-annonce
9 février 2022 – De Jonathan Barré
avec Grégoire Ludig et David Marsais