LOVE, DEATH + ROBOTS
Qui ?
Si David Fincher ne parvient plus depuis Gone Girl (sorti en 2014 pour rappel) à revenir sur grand écran, le bonhomme fait son petit bonhomme de chemin sur Netflix, section séries. Déjà en réalisant le pilote d’House of Cards, mais surtout en participant à la mise en scène de la solide Mindhunter (2017) et en co-produisant Love, Death + Robots, une série anthologique de 18 courts-métrages d’animation de science-fiction, rendant hommage à l’esprit de feu-Métal Hurlant. Il retrouve pour l’occasion Tim Miller (Deadpool récemment), qui avait déjà collaboré avec lui sur Millenium, et qui est ici à la création et à la supervision du projet, en plus de réaliser un des courts (le très oubliable Ice Age).
Au niveau des studios sélectionnés, certains sont spécialisés dans les effets spéciaux de films (Blur a travaillé sur Avatar de James Cameron, Sony Pictures Imageworks sur toutes les productions animées du studio américain) ou de jeux vidéo (Platige Image sur les deux premiers The Witcher, Digic Pictures sur les jeux Warhammer) ; assez peu finalement de studios réellement dédiés à la création filmique, mis à part Passion Pictures ou Red Dog Culture House. Pour la petite statistique, on retrouve neuf studios européens (dont deux basés en France, Unit Image et Studio la Cachette) sur les seize studios engagés, le reste se partageant entre les Etats-Unis, le Canada et la Corée du Sud (Red Dog Culture House).
Quoi ?
« La bande-annonce qui suit est réservée à un public adulte » prévient Netflix, annonçant clairement la couleur, avant de rectifier et de le réserver à un public « tordu ».
Quand ?
Love Death + Robots est disponible sur Netflix depuis le 15 mars.
Pourquoi (pas) ?
Sur le papier, la formule paraît alléchante. Des courts d’animation avec de grandes influences steampunk et un ton décalé et mature ? Parbleu, cela donne envie ! Hélas, le résultat final est loin de cet état des lieux idyllique. Pourtant, tout n’est pas à jeter dans Love, Death & Robots : les courts Three Robots (pour peu que l’on soit sensible au concept et à l’univers qui rappelle NieR: Automata), Good Hunting et Zima Blue sont des réussites indéniables, à la fois ambitieux, drôles, intelligents et crédibles en tant que propositions artistiques et narratives. Malheureusement, la faible durée de ces courts frustre, notamment dans le cas de Good Hunting qui aurait pu faire l’objet d’un long-métrage sans souci, dans la lignée du Steamboy d’Otomo, dont il partage la fascination pour la mécanique. D’autres éléments positifs peuvent être relevés sur différents courts-métrages : le parti-pris artistique de The Witness (qui ne plaira pas à tout le monde), ce vaisseau étrangement vivant et intriguant dans Lucky 13, les tracteurs lourdement armés de Suits… Mais ces épisodes souffrent aussi de défauts qui les rendent sympathiques mais parfaitement oubliables une fois le générique de fin déroulé.
Sur 18 courts-métrages, cela fait peu de moments marquants à se mettre sous la dent. La faute à un abus d’images de synthèse sur la moitié de la sélection, qui rend ces courts parfaitement génériques les uns par rapport aux autres, et insipides artistiquement, car conçus comme de mauvaises cinématiques de jeux vidéo. Pour une série anthologique où rien ne doit justement se ressembler, il y a comme un problème majuscule. Les histoires et les univers dépeints étant banals, le tout échoue souvent à intéresser le spectateur, la plupart des courts tombant soit dans l’humour bas de gamme, soit dans un aspect “mature” exagéré et donc gratuit. Un bon exemple de ce gâchis est le dernier court, Secret War : une réécriture de l’Histoire qui pourrait être flippante mais qui ne dépasse jamais la démonstration technique et bourrine sans âme, de la première à la dernière seconde. Il est d’ailleurs amusant, et presque effrayant, de noter que malgré toute l’évolution technologique, ces courts restent bien moins impressionnants et crédibles que le film Final Fantasy, sorti en… 2001.
Le concept anthologique avait cela d’intéressant que l’on pouvait espérer voir des propositions artistiques réellement variées, de même pour les histoires narrées ou les technologies utilisées. Métal Hurlant était un creuset de création artistique pour emmener le lecteur jusqu’au bout de l’imaginaire ; ce n’était pas toujours réussi (pour le peu lu), mais ça se voulait innovant et abouti. Love, Death & Robots ne semble avoir retenu que la partie SF sans réellement avoir songé à diversifier sa sélection : où sont les studios japonais ? Africains ? Sud-américains ? Des studios autres que des prestataires de jeux vidéo ou de VFX ? Si saison 2 il y a (très probable), ce sera une piste de réflexion essentielle à aborder par Miller et Fincher. Pour le moment, leur série est surtout un gâchis en terme d’imaginaire et de créativité, tout juste sauvé par la qualité de trois courts-métrages sur dix-huit.