MASSACRE À LA TRONÇONNEUSE
Melody, sa sœur adolescente Lila et leurs amis Dante et Ruth se rendent dans la petite ville de Harlow, au Texas, pour lancer une nouvelle entreprise. Mais leur rêve se transforme bientôt en cauchemar éveillé lorsqu’ils pénètrent sans le vouloir dans le monde de Leatherface, le dangereux tueur en série dont l’héritage sanglant continue de hanter les habitants de la région. Parmi eux, Sally Hardesty, unique survivante du tristement célèbre massacre de 1973, et bien décidée à se venger.
Critique du film
Massacre à la tronçonneuse fait partie de ces franchises hollywoodiennes qui ne semblent jamais vouloir mourir : après le succès de la version originale de 1974, pas moins de sept films ont vu le jour, le dernier datant de 2017. Du remake des années 2000 jusqu’aux sequels à foison qui ont suivi, il paraissait impossible de tirer quoi que ce soit de plus de cette histoire de boogeyman façon Texas ; c’était sans compter Netflix, qui s’est fait ces dernières années le champion des adaptations (plus ou moins réussies) de grands classiques hollywoodiens. Alors que la plateforme nous livrait en 2021 sa version de Rebecca, elle s’attaque en 2022 à l’un des monuments les plus cultes du film de genre, forte du succès estival de sa trilogie horrifique Fear Street. Après tout, le cinquième volet de Scream vient de voir le jour et Halloween continue d’avoir le vent en poupe : pourquoi pas ?
Malheureusement, et malgré une intention louable – remettre au goût du jour un classique des années 70 et lui insuffler un zeste de modernité – la version streaming de Massacre à la tronçonneuse s’enlise dès le début. Portée par un groupe de personnages au passé trouble, auxquels le spectateur.trice a à peine le temps de s’attacher avant de les voir mourir, le film part d’emblée du mauvais pied en nous offrant une trame narrative emberlificotée et inutilement complexe. On peine à comprendre ce que Dante et Melody viennent faire à Harlow (ouvrir un food concept store ? Lancer une vente aux enchères ?), tandis que les
autres personnages semblent tout bonnement plantés là par convenance scénaristique. La violence, pourtant suavement amenée dans la version originale ainsi que dans le remake de 2003, surgit ici de façon abrupte, sans laisser à la tension le temps de s’installer, et nous entraîne dans un film d’horreur extrêmement prévisible et dont les enjeux, déjà pauvres, semblent évacués dès les trente premières minutes.
La volonté d’insuffler des problématiques modernes au récit – circulation des armes aux Etats-Unis, massacres qui en découlent, gentrification, confrontation Nord/Sud – se heurte à l’absence totale de profondeur des personnages, qui ne semblent pas réellement avoir d’arc narratif précis et font plutôt office de totems périmés : les premiers à mourir sont ainsi la jeune femme blonde en mini-short et son fiancé noir…. Une ouverture de mauvais goût pour une industrie qui prétend se défaire des clichés sexistes et racistes du film d’horreur. La présence d’un personnage historique de la franchise, Sally Hardesty, qui aurait pu insuffler au film une certaine saveur, dans la lignée du retour de Jamie Lee Curtis, tombe malheureusement comme un cheveu sur la soupe ; difficile de faire le lien entre la texane à l’écran et l’emblématique première final girl du cinéma américain, originellement incarnée par l’actrice Marilyn Burns, décédée en 2014.
Alourdi par ces défauts scénaristiques, Massacre à la tronçonneuse peine à trouver sa place : production grand public léchée, le film semble vouloir s’adresser aux fans mais peinera à les convaincre, tout en écartant les spectateurs.trices nouvelle génération qui ne se retrouveront pas dans les références à la franchise. Un projet qui semble hasardeux et dont le résultat est finalement à l’image de sa production chaotique – le film a été tourné deux fois et a changé de réalisateur en cours de route… Certaines histoires ont tout intérêt à se terminer, et il serait temps de laisser Leatherface reposer en paix.
Bande-annonce
18 février 2022 (Netflix) – De David Blue Garcia, avec Sarah Yarkin, Elsie Fisher, Mark Burnham