MOVING ON
Okju, son petit frère Dongju et leur père emménagent chez leur grand-père à la fin de l’année scolaire. Les visites de la tante des enfants se font de plus en plus fréquentes et elle vient finalement, à son tour, s’installer dans la maison familiale. Au fil de l’été, enfants et petits‑enfants doivent prendre des décisions difficiles pour l’avenir de la famille.
Critique du film
Récompensé au Festival de Busan et lauréat dans la section Bright Future à Rotterdam, Moving On est parvenu sur les écrans français grâce au Festival du Film Coréen à Paris où le premier long métrage de Yoon Dan-Bi était présenté en sélection, avant d’être proposé sur la plateforme Mubi.
Comme dans Petite nature, un de nos coups de coeur cannois à la Semaine la Critique attendu en salle au printemps, Moving On s’ouvre sur un déménagement contraint. À bord d’une camionnette, un père et ses deux enfants se rendent chez le grand-père paternel diminué par ses problèmes de santé, pour s’y installer. Accompagner ses vieux jours mais également tenter de subsister car, on le comprend, le noyau familial incomplet (la maman est partie) peine à s’en sortir financièrement. Le père, qui revend des chaussures de marques contrefaites, doit ravaler sa fierté et emménager chez ce père avec lequel il n’a jamais eu de connexion forte. Ce choix de circonstance provoque la rencontre avec ce grand-père jusqu’alors peu présent dans la vie de ses petits-enfants. Un lien tardif palliatif alors que l’adolescente, Okju, ne pardonne pas à leur mère d’avoir disparu de leur vie et de tenter de se racheter leur affection par des attentions matérielles.
Comme dans Petite nature aussi, il est question de rancune et d’absence. Paternelle dans le drame de Samuel Thaïs, maternelle ici. Elle agit comme le conducteur dramatique, fil rouge indicible de ce mélodrame sur la résilience et le deuil. La réalisatrice coréenne sonde avec subtilité la thématique de la famille et des divergences intergénérationnelles. Cet aïeul désormais dépendant, jusqu’alors un étranger pour les deux enfants, leur offre un nouveau noyau familial en même temps qu’un foyer.
Dans Moving on, les douleurs ne disent par leur nom et sont étouffées dans les silences – l’alcool, la fuite ou l’évitement. En pleine construction de son identité, Okju tient les autres à distance : elle blâme son père ou tente d’alimenter la rancoeur de son petit frère, trop prompt à accepter les visites ou les dons de leur mère, refuse qu’il dorme avec elle ou pénètre dans sa chambre, refuge intime de la seule femme du logis. Seule la tante, invitée de circonstance suite à une séparation soudaine et temporairement tue, y est acceptée. Elle trouve une oreille attentive, une complicité féminine. Elle cherche enfin à trouver du réconfort auprès de ce petit-ami qui semble ne lui accorder pourtant que guère d’attention.
Lorsque le dernier segment soulève la question de la fin de vie du grand-père de façon plus concrète, les noeuds du coeur se dénoue et l’émotion devient alors permise. La peine, trop longuement contenue, s’exprime enfin dans un épilogue poignant.