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MOXIE !

Dans une petite ville du Texas, une fille de 16 ans en rebellion contre le système, Viv Carter, découvre que sa mère était membre d’un groupe de punk proche du mouvement « Riot Grrrl » dans les années 1990. Inspirée par sa mère, Viv crée alors un fanzine militant et commence une révolution féministe au sein de son lycée.

Critique du film

Ce 3 mars arrive sur Netflix une nouvelle comédie de lycée, Moxie. Les abonnés à la plateforme penseront certainement – et cette dernière leur aura donné quelques raisons d’avoir cet apriori, si l’on constate la qualité fluctuante des films pour ados – qu’il s’agit là d’un énième divertissement formaté et superficiel, à suivre d’un œil détaché, entre un post Insta et une poignée de pop-corn. Pourtant, le réduire à une simple teen-comedy lambda serait une grosse erreur tant le nouveau long-métrage d’Amy Poehler mériterait de devenir un gros hit de visionnage alors que les salles obscures gardent portes closes. Suivez notre conseil, rangez votre ordi (ou posez votre smartphone) et précipitez vous sur cette comédie qui vise juste sur le harcèlement et torpille le sexisme avec humour et fraîcheur.

Ces dernières années, depuis le mouvement #MeToo, les prises de parole féminines se sont faites plus fréquentes et le vent du changement a commencé à souffler. Début 2021, en France, plusieurs personnes ont aussi témoigné des abus subis lors de leur enfance (dans le sillon de la sortie du livre de Camille Kouchner) et, encore plus récemment, quelques femmes ont eu le courage de s’exprimer face au comportement de prédateur sexuel de figures médiatiques (telles que Patrick Poivre d’Arvor) – car ces agissements ne sont pas exclusifs au monde des producteurs et réalisateurs. Les langues semblent se délier enfin et le long combat pour l’égalité des sexes, le respect du consentement, l’écoute et la prise en charge des victimes, la liberté de jouir de son corps et de l’assumer sans discriminations ou injonctions à la pudeur, progresse tant bien que mal. Et la nouvelle génération pourrait se faire, doucement mais sûrement, le porte parole de ce besoin vital de changement. Moxie s’inscrit parfaitement dans la lignée de ce mouvement visant à bousculer l’ordre solidement établi du patriarcat.

Rebel girl ★

Dans un lycée texan, Vivian, une élève introvertie de première, assiste à un cours de littérature. Une camarade fraîchement arrivée dans l’établissement, interrogée par son enseignant, ose une opinion culottée mais pertinente au sujet d’une des lectures imposées pour la rentrée : Gatsby le magnifique. Elle remet en question la légitimité d’un tel choix et interroge le professeur : pourquoi continue-t-on à lire des livres sur le rêve américain comme celui-ci, écrit par un homme blanc riche, qui parle d’un homme blanc riche dont le seul tracas est de ne pouvoir avoir la femme qu’il désire ? Ne serait-il pas plus pertinent de lire des ouvrages rédigés par des immigrés venus aux Etats-Unis pour tenter de s’offrir une vie plus digne ? Rapidement, la lycéenne est interrompue par la coqueluche du lycée. Le mansplaining dans toute sa splendeur. Le garçon réfute avec des arguments tout faits et tente de réduire au silence celle qui ose remettre en question, en lui expliquant pourquoi elle a tort.

Moxie film Netflix

Quelques jours plus tard, une liste puérile et discriminatoire est partagée à tous les élèves, sur les réseaux sociaux, attribuant différents titres aux lycéennes : « le plus beau cul », « la plus baisable », « la plus obéissante »… Alertée, la cheffe d’établissement choisit (comme bon nombre de responsables pédagogiques à l’ancienne, que ce soit outre-Atlantique ou en France) d’ignorer les faits. Cette complaisance, symptomatique du laxisme des figures d’autorité face aux harcèlements moraux et sexuels, est la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour Vivian (Hadley Robinson), qui s’inspire de sa nouvelle camarade Lucy, bien décidée à ne pas courber l’échine le temps que son harceleur ne se lasse.

La tête haute ❤

Reprenant le flambeau de sa mère qui rêvait jadis de faire brûler le patriarcat, elle conçoit un journal graphique clandestin frappé du slogan « Free Moxie !« . Briser le plafond de verre et se serrer les coudes, la philosophie des Moxie girls commence à faire des émules chez les lycéennes, épuisées de subir les gestes ou les propos inappropriées et d’être réduites au silence.

Un peu plus tard, la proviseure renvoie chez elle une élève en débardeur refusant de couvrir ses épaules – comprendre son décolleté -, énième manifestation du sexisme intériorisé sous couvert d’une morphologie qu’il faudrait dissmuler au regard des pubères du sexe opposé. Opprimer les femmes plutôt qu’éduquer les hommes. Pour protester contre ce règlement archaïque et arbitraire, laissant penser que les filles seraient responsables de la conduite des garçons, l’anonyme Moxie encourage les adolescentes à se rendre au lycée en débardeur. La révolution est en marche, n’en déplaise aux pères la pudeur étasuniens ou français, soi-disant gardiens du temple de la décence et de la tenue républicaine.

Eduquez vos garçons !

Sous couvert d’un teen movie dans l’air du temps, Moxie d’Amy Poehler invite à revoir le modèle éducatif actuel et à refuse ces « valeurs » que l’on infuse insidieusement dans l’esprit des femmes comme dans celui des jeunes hommes. Il ne s’agit finalement pas de rhabiller les filles mais bien de mieux éduquer les garçons, le problème n’étant pas que les filles (ou femmes) portent des jupes ou des débardeurs, mais bien celui que les garçons pourraient les harceler.

Face à l’hypocrisie de nos dirigeants (coucou Jean-Michel), le film incitera peut-être la nouvelle génération masculine à se regarder dans le miroir et à entamer une introspection – mais cela ne pourra pas se faire sans l’aide de ceux qui instruisent et éduquent. Parce qu’un « nouveau monde » plus inclusif, égalitaire, respectueux du consentement réciproque, est définitivement l’affaire de tou.te.s. Laissons les fragiles du patriarcat crier à l’hystérie et pleurer sur leurs privilèges. Le monde évolue, que ça leur plaise ou non.

Bande-annonce

3 mars 2021 (Netflix) – De Amy Poehler, avec Hadley Robinson, Lauren Tsai, Josephine Langford