NOS PLUS BELLES ANNÉES
C’est l’histoire de quatre amis, racontée sur quarante ans, en Italie, des années 1980 à aujourd’hui. La chronique de leurs espoirs, de leurs désillusions, de leurs amours, et surtout, de leur amitié.
Critique du film
Peut-on rendre hommage à Nous nous sommes tant aimés sans tomber dans le pastiche ? Gabriele Muccino se propose de répondre oui et emprunte à Ettore Scola la structure de son film. La frénésie y remplace toutefois la poésie.
Nos plus belles années s’ouvre sur Pierfrancesco Favino, hilare. Ce dernier nous invite à revenir en 1982 ; le film déroule ensuite la vie de ses quatre personnages jusqu’en 2020. Giulio, Paolo, Riccardo et Gemma : jeunes, pleins de vie et d’envies. Dans la même dynamique que chez Scola, le film interroge leurs aspirations, le hasard et les compromissions. Un film sur la quête de ce que l’on veut dans la vie. Premier objectif, mettre la main sur une vieille Mercedes SL-450, quasi-épave mais « profondo rosso ».
Muccino conserve également l’aspect fresque de Nous nous sommes tant aimés, mais décale les événements de son film dans le temps. Finis les balbutiements de la première République italienne : c’est plutôt son crépuscule qui l’intéresse. Le film, fait rare dans le cinéma italien, met d’ailleurs des images sur la transition entre les deux républiques et le(s) scandale(s) qui l’accompagne(nt).
Italiens, trop italiens
Comme dans son précédent long-métrage, Une famille italienne (2018), les italiens de Muccino sont très intenses – pour ne pas dire très italiens. Ils vivent, se déchirent, éructent ; on a parfois l’impression qu’ils n’en peuvent plus de respirer. Ce sont sans doute les italiens d’un cinéaste exilé quelques temps aux États-Unis, qui essaye de se reconnecter à son pays. Il sait cela dit les raconter. Le réalisateur est né en 1967, à peu près en même temps que ses personnages.
Nos plus belles années se veut hommage à la commedia all’italiana, dans l’écriture comme dans le jeu des acteurs. Giulio, Paolo, Riccardo et Gemma sont chaotiques, frénétiques comme à la grande époque et se créent eux-mêmes des problèmes dans leur fièvre. Muccino dresse le même bilan que les héros d’Age, Scarpelli et Scola : le quatuor voulait changer le monde, mais c’est le monde qui l’a changé.
Pierfrancesco Favino (Giulio), impeccable dans un rôle taillé sur mesure, ferait presque de l’ombre à ses collègues. S’ils n’avaient pas le brio de Claudio Santamaria (Riccardo), discret premier rôle dans On l’appelle Jeeg Robot, et Micaela Ramazzotti.
Cette dernière se bat avec un rôle sous-écrit mais l’élève au fur et à mesure par son jeu. Comme Luciana dans Nous nous sommes tant aimés, elle est d’abord définie par l’intérêt que lui portent ces messieurs.
Nous voulions changer le monde, mais le monde nous a changés
Gabriele Muccino n’est pas un grand réalisateur mais Nos plus belles années est son meilleur film. Sa mise en scène reste légère, parfois imprécise. Des ruptures du quatrième mur régulières empruntées à Nous nous sommes tant aimés viennent rythmer le film. Pourtant, l’écriture a quelque chose de programmatique, comme s’il voulait se persuader de l’existence de cycles et absolument réconcilier la classe moyenne italienne avec elle-même.
Muccino livre un film de bonne facture, adossé au single d’un ténor de la pop italienne, Claudio Baglioni. C’est une formule éprouvée par le réalisateur dans Juste un baiser (avec L’Ultimo Bacio) puis Encore un baiser (Baciami Ancora). Pour un grand succès au box office italien l’année dernière et un excellent produit d’exportation.
Bande-annonce
29 décembre 2021 – De Gabriele Muccino, avec Pierfrancesco Favino, Micaela Ramazzotti et Kim Rossi Stuart.