NOUS LES LEROY
Sandrine Leroy annonce à son mari Christophe qu’elle veut divorcer. Leurs enfants ont bientôt l’âge de quitter la maison. Dans une opération de la dernière chance aussi audacieuse qu’invraisemblable, Christophe organise un week-end pour sauver son mariage : un voyage passant par les endroits clés de l’histoire de leur famille. Un voyage qui ne va pas être de tout repos…
Critique du film
Quand on observe la transposition de l’humour américain en France, on peut facilement déceler ce qui passionne certains auteurs : une vénération de l’outrance, d’une approche plus chaotique et visuelle de l’humour. L’un des derniers exemples, construit il y a dix ans, de ce phénomène est l’humour de la Bande à Fifi. Parti d’une réappropriation du « found-footage » festif, imaginé par Nima Nourizadeh avec le teen-movie Projet X, cette élaboration de l’humour slapstick gras lorgnait sur les productions Happy Madison menées par la clique d’Adam Sandler. Florent Bernard, réalisateur de Nous les Leroy, a souvent revendiqué une influence directe de la comédie d’outre-Atlantique dans son humour et ce qu’il souhaite transmettre. Pourtant, ce sera vers un autre horizon comique anglo-saxon que va se diriger le réalisateur-scénariste pour son premier long-métrage : l’accès à la conversation, en racontant l’histoire d’un père organisant un road-trip avec sa famille pour empêcher un divorce imminent.
Par le fil rouge de ce road-trip, Nous les Leroy laissait présager justement que le trajet se dirigeait tout droit vers une transposition française des National Lampoon’s Vacation, cette série de films potaches où Chevy Chase faisait voyager sa famille vers des destinations semées d’embûches. Notamment par le fait que chaque point du voyage amène, au départ, une situation comique par des seconds-rôles hilarants (on pense notamment à Lyes Salem en adulescent divorcé ou Sébastien Chassagne en caricaturiste arrogant).
Mais ce qui rend ce voyage en Bourgogne si touchant est l’habilité de Florent Bernard à trouver le bon équilibre entre l’humour et le drame, en accordant une place notable à chaque personnage écrit dans le scénario, chacun ayant ses propres problèmes à régler – mal-être adolescent, difficulté à se mettre en couple, sentiment de voir sa vie passée sous ses yeux. C’est donc par une déviation vers le cinéma de James L. Brooks que Nous, Les Leroy va tracer sa route. Par des scènes de conversations, aux dialogues bien ciselés, tout le monde va devoir écouter l’un ou l’autre à un moment donné pour évoluer. En cela, Nous les Leroy réussit à s’extirper de ses influences pour devenir un film particulièrement sincère et touchant.
Si le film doit toutefois faire attention à ce que l’humour n’envahisse pas systématiquement le drame, en raison d’un assemblage de scènes pouvant, par moments, donner l’impression d’une succession de sketchs (en particulier lors d’une séquence de bus), il nous fait quitter la salle de projection avec une sensation de tendresse. La philosophie des films de James L. Brooks, sur laquelle il est dit qu’il ne faut jamais se laisser reposer sur nos certitudes de la vie, plane alors dans cette comédie dramatique drôle et touchante récompensée du Grand Prix au festival de l’Alpe d’Huez.