SOUS LE TAPIS
Critique du film
Alors qu’Odile et Jean se préparent à accueillir leurs enfants et petits-enfants, le patriarche s’effondre sur le sol de la chambre. Il faut plusieurs minutes avant que son épouse ne le découvre inanimé au sol. Malgré ses tentatives, les secours demeurent injoignables et le voisin ne peut que constater la terrible nouvelle : son mari s’est éteint à jamais. Prise de court par l’arrivée de sa famille, Odile décide sans réfléchir de dissimuler le corps de Jean sous le lit, incapable d’annoncer la nouvelle à ses proches et de gâcher cette réunion familiale en l’honneur de son anniversaire.
Prétextant que Jean se repose et fait une sieste, puis évoquant une dispute qui l’a poussé à s’absenter pour la soirée, Odile repousse l’inévitable pour ne pas avoir à affronter la suite. Cette terrible dissimulation ne pourra pourtant durer très longtemps, et son petit-fils découvre d’abord le tragique secret, avant que le lendemain celui-ci ne soit enfin dévoilé, plongeant la famille dans le deuil et ses deux enfants dans le questionnement : pourquoi avoir caché le décès de leur père ? Plusieurs décennies de vie commune touchent à leur fin, ne laissant que le vide et les souvenirs, et faisant peut-être même remonter une tragédie antérieure qui n’aura pas été verbalisée et conduit vers ce nouveau déni.
Papy n’est plus là
Comédienne établie, Camille Japy a souhaité prolongé son premier court-métrage, Petites filles, afin d’approfondir le thème de la difficulté de faire le deuil. Evoquant les liens familiaux et la capacité réparatrice de la parole, Sous le tapis articule son histoire autour du personnage de la formidable Ariane Ascaride qui, par ce geste impulsif, a tenté d’occulter cette réalité qui l’angoisse et bouleverse l’équilibre familial. Les interrogations de ses enfants la conduiront progressivement à faire face à ce drame, malgré sa résistance, dévoilant finalement un traumatisme passé déjà tenu secret et qui explique bien des choses. Avec, à la clé, une réparation et la possibilité tardive d’une libération.
Cette dramédie familiale profite largement de la belle prestation de ses deux actrices, Ariane Ascaride et Bérénice Béjo, qui sont le poumon du récit et principales vectrices de l’émotion. Pour autant, le drame est parfois rattrapé par la légèreté du quotidien, l’innocence des enfants et le burlesque des situations, offrant de jolis instants de poésie et quelques scènes amusantes. Si elle n’évite pas quelques passages obligés de la comédie familiale, Sous le tapis s’en sort avec les honneurs grâce à sa délicate manière de rappeler que chacun peut choisir son chemin de deuil, qu’il soit douloureux ou une célébration de la vie du défunt et des souvenirs partagés. Touchant.
Bande-annonce
19 juillet 2023 – De Camille Japy, avec Ariane Ascaride, Bérénice Bejo, Thomas Scimeca
