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SUSPIRIA

Suzy, une jeune Américaine, débarque à Fribourg pour suivre des cours dans une académie de danse prestigieuse. A peine arrivée, l’atmosphère du lieu, étrange et inquiétante, surprend la jeune fille. Et c’est là qu’une jeune élève est spectaculairement assassinée. Sous le choc, Suzy est bientôt prise de malaises. Et le cauchemar ne fait qu’empirer : le pianiste aveugle de l’école meurt à son tour, égorgé par son propre chien…. Suzy apprend alors que l’académie était autrefois la demeure d’une terrible sorcière surnommée la Mère des Soupirs. Et si l’école était encore sous son emprise ?

Trompe l’oeil.

Quelques notes d’une musique presque guillerette scandent la brutale arrivée du générique sur fond noir. Comme de délicates tiges de métal tintinnabulant en chœur. Mais voilà que de sourds grognements désagrègent l’harmonie. Enfin, soupirs et cris achèvent l’idylle. Le conte de fées vire au macabre. Pendant ce temps, Suzy (Jessica Harper), une jeune Américaine venue s’inscrire à l’école de danse de Fribourg, erre dans l’aéroport. Depuis la voiture qui l’amène à l’école, elle voit une élève courir effarée au milieu des bois. Ambiance…

Suspiria, le chef-d’œuvre de Dario Argento qui ressort ce mois-ci – avec cinq autres films du maître – et dont le remake de Luca Guadagnino arrivera en novembre, est pareil à la bande-originale de Goblin. Ce qui s’annonce comme un conte de fées déchante bien vite. Car des puissances primitives, surgies des plus profondes ténèbres – les nôtres – crèvent le décor enchanteur de l’école.

Le Technicolor trompe le regard : ses tons baroques dissimulent le drame ; ou plutôt, le camouflent pour mieux en révéler l’horreur. Ce choix résolument formaliste contient toute une théologie du Mal. Car ce dernier existe sous bien des formes, y compris les plus jolies, telles l’école de danse ou la verrière par laquelle tombe la première victime. Il n’y a pas de lien entre Bien et Beau. Au contraire : plus un lieu est beau, gracieux, prestigieux, plus la corruption et la perversité y règnent.

Cette théologie pessimiste a une traduction esthétique. Les meilleures séquences reposent uniquement sur leur puissance sensorielle, tendue entre l’image baroque et la musique dissonante. Les sens en disent plus long qu’un scénario somme toute convenu.

Avec les sorcières de l’école, Argento semble avoir noué un pacte, au terme duquel il leur emprunte leur vision du monde. Pareilles à la magie noire, image et musique opèrent un rituel de transfiguration de l’univers. Dé-figurant et dé-formant la réalité, elles y puisent dans les profondeurs les pouvoirs qui gisent sous la surface des choses. Et qui en bénéficie ? Le cinéma, qui par ce pacte maléfique, enrichit considérablement son spectre sensoriel.

La fiche
Suspiria affiche

SUSPIRIA
Réalisé par Dario Argento 
Avec Jessica Harper, Joan Bennett, Stefania Casini …
Italie – Thriller, épouvante-horreur

Sortie en version restaurée : 27 juin 2018
Durée : 95 min




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