TERMINAL SUD
Dans un pays plongé dans un climat d’insécurité et de conflit armé, un médecin tente malgré tout d’accomplir son devoir au sein d’un centre hospitalier, jusqu’au jour où son destin bascule…
Critique du film
Terminal Sud, le 7e long métrage de Rabah Ameur-Zaïmeche, tient de la complainte moderne, construite autour d’un anti-héros, tour à tour spectateur, témoin et victime dans une ville en état de guerre. Ramzy Bedia, intensément las, éclaire un film qui travaille en beauté son inaccomplissement.
Il suffit de quelques scènes pour comprendre que le film va avancer par évocations. Une géographie plutôt méditerranéenne, un conflit armé teinté de guerre civile où les militaires tendent des embuscades à moins que ce soit les bandits qui portent treillis. Au centre de cette nébuleuse, « Le docteur », personnage avec lequel le spectateur traverse le récit. Le flou narratif donne de l’épaisseur au climat d’intranquillité que la mise en scène instaure. Ameur-Zaïmeche pose des balises entre lesquelles la place laissée à l’imaginaire est grande. Il construit peu à peu un hors-champ mortifère dont l’image ne rend compte que par bribes : un pouvoir violent, des maquisards inquiétants, des armes, partout, qui blessent et exécutent.
La terreur règne
Le film déroule un canevas qui va puiser dans les archétypes une forme d’universalité. On peut regretter un excès de symboles tout en étant sensible à la mécanique liberticide. La presse libre est effacée, le bras armé semble tomber aveuglément, la terreur règne.
Plus le film avance, plus le docteur endosse les habits d’une figure sacrificielle. il est celui autour duquel l’étau se referme avant de flirter avec les portes de l’enfer. Avant que son destin ne bascule, il résiste, un parmi les victimes. Il soigne mais ne sauve pas, il met en terre mais ne prie pas, il boit mais ne partage pas. Ameur-Zaïmeche réussit de très belles scènes autour des rites funèbres. Il filme avec une infinie dignité les solidarités compassionnelles, les larmes qui se mêlent aux gouttes de sueurs, pelle en main, les voix au diapason pleurant le défunt lors d’une scène qui rappelle les chants dans l’asile de Bled number one.
Traits tirés, silhouette émoussée, regards perdus, Ramzy Bedia incarne avec beaucoup de conviction ce médecin emporté comme fétu de paille dans les tourments de l’Histoire. Il est d’autant plus émouvant qu’il porte avec lui, en creux, ce personnage populaire à la dérision enfantine, une légèreté assassinée. Son interprétation permet de ne pas décrocher de cette fable noire souvent trop schématique.
Bande-annonce
20 novembre 2019 – de Rabah Ameur-Zaïmeche, avec Ramzy Bedia