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THE FABELMANS

Le jeune Sammy Fabelman tombe amoureux du cinéma après que ses parents l’ont emmené voir « The Greatest Show on Earth ». Armé d’une caméra, Sammy commence à faire ses propres films à la maison, pour le plus grand plaisir de sa mère qui le soutient.

Critique du film

La question du regard sur l’enfance hante une majeure partie de l’œuvre de Steven Spielberg. A la manière d’un fil rouge qui traverserait en filigrane sa riche filmographie, le cinéaste se sera penché à de nombreuses reprises sur le destin de jeunes héros évoluant au sein de cellules familiales en crise (E.T, Arrête-moi si tu peux…) ou devant composer avec un monde adulte plus ou moins hostile (Empire du Soleil, A.I. Intelligence Artificielle…). Des problématiques disséminées pendant plus de 40 années de cinéma et que Spielberg a largement reconnues comme étant intimement liées à son histoire personnelle. Dès lors, l’annonce de The Fabelmans apparait comme une étape évidente dans la carrière du cinéaste : à 75 ans, le réalisateur saute le pas de l’auto-fiction et porte directement ses souvenirs de jeunesse sur grand écran.

Comment nait une vocation ? Spielberg donne un élément de réponse dès l’ouverture de son film, dans laquelle Samy – double fictif de Steven – est emmené au cinéma pour la première fois de son existence. Angoissé avant de pénétrer dans la salle obscure, ses parents tentent de le rassurer, chacun à sa manière : son père en lui dévoilant l’envers technique de ce qu’il s’apprête à découvrir quand sa mère lui rappelle que ce qui se déroule sur l’écran n’est qu’une belle illusion dont il faut savourer chaque émotion qu’elle procure. Deux manières de voir le cinéma, l’une ne prévalant pas sur l’autre et qui vont résonner au plus profond du jeune garçon. Passé l’électrochoc émotionnel de la projection, Samy va utiliser tous les moyens à sa disposition pour recréer les images (et les émotions) qui l’ont saisi. En une poignée de séquences et avec un premier degré désarmant, Spielberg parvient à retranscrire la magie du frisson ressenti à la découverte d’un film sur un écran de cinéma. 

C’est bien l’amour inconditionnel du réalisateur pour le septième art qui innerve chaque plan de The Fabelmans. D’abord, grâce à un remarquable travail d’écriture. Avec le talent de conteur qui le caractérise si bien, Spielberg (accompagné au scénario par Tony Kushner) convoque ses souvenirs d’enfance pour en tirer un récit d’apprentissage dans la plus pure tradition hollywoodienne. Passionné par les images et leur pouvoir évocateur, le jeune Samy décide d’y consacrer tout son temps et son énergie. D’un petit film en Super 8 où l’enfant filme ses jouets pour remettre en scène l’accident de train de Sous le plus grand chapiteau du monde, à une production artisanale d’envergure sur la seconde guerre mondiale, le film retrace la naissance évidente d’un cinéaste, animé par la volonté de raconter des histoires. 

The fabelmans

Cette histoire, elle est belle et touchante, mais elle prend une dimension autre lorsque Spielberg s’amuse à placer ici et là des références à ses travaux les plus célèbres. Le cadre d’E.T. ou la scène inaugurale d’Indiana Jones et la dernière croisade sont ainsi discrètement cités au détour d’un plan ou d’une scène, rappelant que chez le réalisateur de Jurassic Park, l’art et la vie se nourrissent mutuellement dans un mouvement perpétuel. De la même façon que l’esprit cartésien et scientifique d’un père et la personnalité fantasque et créative d’une mère forment les deux facettes indissociables de l’artiste en devenir qu’est Sammy/Steven. 

Si The Fabelmans offre des pistes de réflexions théoriques passionnantes sur le cinéma de son auteur, celui-ci ne sacrifie pour autant jamais l’émotion, bien au contraire. D’une pureté rare, la mise en scène de Spielberg parvient à toucher l’universel lorsqu’elle s’intéresse au drame familial qui se joue en coulisse de cette success-story. Là encore, c’est de par le cinéma que nait l’émotion, lorsque sur son banc de montage, Samy découvre un terrible secret parental, révélé petit à petit par les images captées par la caméra. Se joue alors une mise en abyme vertigineuse lorsque la symbiose des images, de la musique et du montage produisent le même effet dévastateur sur les personnages et les spectateurs !

Avec The Fabelmans, Steven Spielberg opère un tour de force au sein même de sa monumentale filmographie : celui d’offrir une ode magnifique à tout l’imaginaire qui l’a construit tout en posant un regard tendre et mélancolique sur son œuvre et le cinéma de manière générale. Mais c’est peut-être avant tout cela la plus déchirante des lettres d’amour d’un enfant à ses parents.

Bande-annonce