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THE LAST SHOWGIRL

Shelly, une danseuse de cabaret expérimentée, doit faire face à son avenir lorsque son spectacle à Las Vegas est brusquement interrompu, après 30 ans de représentation. Danseuse dans la cinquantaine, elle peine à trouver quelle suite donner à sa carrière. Et en tant que mère, elle cherche à réparer une relation tendue avec sa fille, qui a souvent été reléguée au second plan par rapport à sa famille d’artistes.

Critique du film

Coppola est un nom qui commence à résonner à toutes les sauces, des scandales liés au comportement du patriarche sur ses récents tournages en passant par l’attrait de sa fille pour représenter les prisons dorées de femmes dont la condition a été reléguée au second plan. Depuis une dizaine d’années s’est ajouté une autre personnalité de la dynastie Coppola, s’essayant à son tour à la mise en scène : Gia Coppola, nièce de Sofia. Dans un clan qui ressemblerait à une sorte d’empire dont le nom ne serait plus simplement affilié à Apocalypse Now ou à une certaine trilogie mafieuse sortie entre les années 1970 et 1990, la carrière de réalisatrice de Gia Coppola semblait avoir tourné court, après un creux de près de sept ans entre son premier long-métrage, Palo Alto (2013) et le suivant, Mainstream (2020). C’est avec d’autant plus d’intérêt qu’on pouvait découvrir sa nouvelle production, débarquée en mars dans les salles françaises, The Last Showgirl, avec l’espoir que ce troisième long-métrage marque un aboutissement, ou au moins un renouveau. 

The Last Showgirl prend place dans un Las Vegas contemporain, loin, très loin de celui dépeint dans le Showgirl de Verhoeven au sein duquel le « Showgirl-business » avait le vent en poupe et ressemblait à une porte d’entrée illusoire vers la célébrité pour les jeunes arrivistes avides de se faire une place dans une ville de requins. Ici, l’ère des strasses, des plumes et des décolletés bien trop plongeants touche à sa fin. Au milieu de cette débâcle silencieuse, Shelly (Pamela Anderson, dont personne ne remettra en doute à première vue la pertinence du choix de casting) est une femme à la cinquantaine passée qui n’a connu toute sa vie que cette scène et ses spectacles pittoresques. C’est donc son monde qui s’écroule quand son régisseur (Dave Bautista) vient annoncer l’arrêt définitif et sans appel du show. Si ce synopsis ouvrait bien des perspectives, nul doute qu’à sa seule lecture beaucoup pensaient déjà y trouver une fable sur l’émancipation digne de quelques œuvres partageant une histoire presque similaire à celles orchestrées par la tante de Gia Coppola.

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Le problème avec The Last Showgirl n’est pas tant que le film ne sache pas sur quel pied danser, mais tient davantage au fait qu’à l’image de sa protagoniste, le film ne danse pas vraiment. Si les débuts laissent envisager une sorte de miroir inversé du Showgirls jusque dans son titre, il n’en est finalement rien : les enjeux du film ne sont suffisamment mis en scène pour être percutants. On sent pourtant clairement les inspirations de Gia Coppola, qui s’inscrit consciemment dans le sillage de sa tante (bien que ce ne soit qu’une ébauche visuelle des idées de Sofia Coppola), et on pourra facilement établir des liens avec l’œuvre de Sean Baker, dont la condition des travailleuses du sexe en compose le fil rouge. 

Pourtant, ce long-métrage peine à trouver le même niveau d’inspiration que ses prédécesseurs. La place de la femme dans une industrie aussi vicieuse que le « showgirl-business » est insuffisamment creusée et le postulat d’une Pamela Anderson vieillissante ayant été détrônée de son statut d’idole n’illustre finalement pas grand chose de fondamentalement intéressant. Pire, si la volonté du film était peut-être de s’emparer de son actrice pour en faire une sorte de fer de lance de ces femmes abandonnées par les grandes industries de divertissement (à l’instar d’une Demi Moore dans le The Substance de C. Fargeat), The Last Showgirl conserve une position étrange, à la limite de ce qu’il voudrait réellement narrer.

The last showgirl

On reçoit la fébrilité de cette histoire avec le sentiment de ne jamais réellement en découvrir le fond véritable, et ce constat devient d’autant plus flagrant lorsque les répliques à l’égard de la poitrine de Shelly se font insistantes. On s’attend légitiment à ce que le personnage de Pamela Anderson manifeste qu’elle est plus qu’un simple physique voué à perdre sa seule vocation, ce n’est pourtant jamais ce qui se produit. Il faudrait que Shelly s’élance, saute de la scène pour rejoindre un plan plus grand que celui de la simple décrépitude.

Gia Coppola semble constamment freiner le propos, comme s’il ne fallait surtout pas se servir de tous les outils mis en place pour conter une histoire féminine et féministe, et l’icône Pamela Anderson ne parait guère plus remise en question qu’à l’époque où elle arborait un maillot rouge vif sur les plages de Malibu. Le potentiel de The Last Showgirl est constamment empêché, la caméra se contentant de filmer les paillettes, les jupes et les poitrines dénudées de ces show-girls sur le départ, jusqu’à laisser un goût amer, comme si Gia Coppola avait filmé ce qu’elle souhaitait dénoncer avant de se rétracter pour n’aborder que timidement la question de l’emprise masculiniste dans un tel milieu, sujet qu’elle survole sans que l’on ne sache réellement pourquoi. 

Le terme d’occasion manquée sied donc parfaitement à The Last Showgirl, film qui aurait pu être porté par un positionnement fort et dénonciateur mais qui se retrouve n’être malheureusement qu’un long-métrage dont la photographie pailletée semble n’être que l’emballage ironique d’une tentative plus qu’inoffensive.

Theo Karbowski

Bande-annonce

12 mars 2025De Gia Coppola