Thou shalt not hate

THOU SHALT NOT HATE

Simone, chirurgien d’origine juive, mène une vie paisible sans lien avec son passé. Un jour, il porte secours à un homme victime d’un accident. Mais lorsqu’il découvre un tatouage nazi sur sa poitrine, Simone l’abandonne à son sort. Rempli de culpabilité, il part à la recherche de la famille de cet homme.

CRITIQUE DU FILM

Pour son premier long métrage, Mauro Mancini interroge l’héritage de la culpabilité et la transmission de la haine dans un thriller moral très élégant. En enfermant ses personnages dans des stéréotypes, le film peine toutefois à convaincre pleinement.

Cas de conscience

« Je n’y suis pas arrivé » témoigne Simone Segre auprès des ambulanciers. Pétrifié par la croix gammée tatouée sur sa poitrine, il n’est pas arrivé à sauver un conducteur victime d’un accident de voiture. On pourrait d’emblée reprocher à la fiction d’en faire trop mais l’histoire est presque vraie. Le scénario s’inspire d’un « fait divers » survenu en 2010 en Allemagne où un chirurgien de confession juive a refusé d’opérer un patient qui portait des tatouages à la gloire du nazisme. Il a demandé à être remplacé.

Hanté par cet épisode, Simone retrouve la trace des enfants d’Antonio Minervini. Sa fille Marica, est de retour à Trieste pour les circonstances. Elle doit s’occuper de ses deux frères, Marcello, habité par la même haine raciste et antisémite que son père et le beaucoup plus jeune Paolo. Marica à la recherche d’un emploi, affiche des petites annonces dans le centre ville. Simone, intrigué par cette jeune femme, l’engage aussitôt. Marcello enrage, il accuse sa sœur d’être « l’esclave d’un juif » et de « trahir les idéaux » du père.

Un étau moral

Thou shalt not hate
Marica voit l’histoire familiale, de laquelle elle s’était éloignée, lui revenir comme un boomerang. Si le film place ce personnage au centre d’un jeu par trop caricatural, il réussit à instaurer un climat de thriller psychologique par une mise en scène à la fois ample et sèche, toujours précise. L’accompagnement musical, une sourdine nourrie de nappes stridentes, manque d’originalité mais pas d’efficacité. Dans les rôles principaux, Alessandro Gassmann et Sara Serraiocco livrent des interprétations sobres et sensibles.

Avec son titre en forme de commandement Thu Shalt Not Hate (Tu ne haïras point) superpose des couches de culpabilité (y compris vis à vis d’un chien) tout en faisant se rapprocher des personnages que tout devrait opposer. Des personnages beaucoup trop au service des intentions du scenario, ce dernier se déroulant sans se soucier des invraisemblances qu’il sème : un chirurgien de province sans aucune interaction sociale. Une suspicion de non assistance à personne en danger qui n’effleure personne. Les plans vus du ciel, un peu systématiques, appuient par ailleurs une vision divine plutôt en contresens avec le propos.

Que fera Simone, après avoir laisser agoniser le père, devant la détresse du fils ?

Avec toutes les limites que son récit édifiant dresse contre lui, le film garde malgré tout une tenue esthétique louable. On va suivre le parcours de Mauro Mancini avec attention, ses qualités de mise en scène méritent d’être revues, libérées d’un discours moins appuyé.

Bande-annonce

De Mauro Mancini, avec Alessandro Gassman, Sara Serraiocco et Luca Zunic.


Présenté au festival des Arcs 2020