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UN PINCEMENT AU CŒUR

 Linda et Irina sont en seconde. Comme tous leurs camarades de classe, elles vont bientôt devoir faire des choix à l’approche du baccalauréat, avec l’étrange sensation d’avancer dans la vie tout en recommençant à zéro. Chaque fin d’année scolaire appelle à un redémarrage, encore plus quand il faut se mettre à penser aux études supérieures, voire à un métier.

Critique du film

En moins de quarante minutes, le documentaire Un pincement au cœur de Guillaume Brac capte le lien à la fois fort et fébrile qui unit les deux jeunes filles à l’épreuve de ce passage. Nous sommes à la toute fin de l’année scolaire, dans un lycée d’Hénin-Beaumont. Si le nom de cette ville évoque immédiatement celle d’une mairie historique d’extrême-droite, le hors-champ social ne se laissera deviner qu’indirectement pour mieux regarder les deux amies et les espaces lumineux, ouverts sur l’avenir, qui se créent autour d’elles.

Les décors du Pas-de-Calais se révèlent d’ailleurs surprenants, aussi loin des clichés. On repense soudain à La Cabale des Oursins, le court métrage de Luc Moullet qui faisait le portrait de ces collines formées par les résidus des mines, appelées les terrils. Luc Moullet en parlait comme d’un « monde ignoré » et Guillaume Brac contribue à en révéler à son tour la cinégénie, en en faisant le joyeux terrain d’une scène de drague lors d’un jogging.

Un pincement au coeur

À travers des discussions, lors de la récréation et des moments de vie inscrits dans le quotidien scolaire le plus simple, se jouent des instants essentiels. La façon dont le cinéaste regarde ses protagonistes leur inspire un ton de confidences, sans jamais que le spectateur ne se sente de trop. De façon extrêmement naturelle, Irina raconte ainsi être l’aînée d’une famille de sept enfants élevés par une mère célibataire, et Linda confie qu’elle se sent incomprise par ses parents et qu’elle ne peut pas imaginer travailler dans le social, afin d’éviter de créer des liens avec les autres, de peur que ceux-ci se brisent. Elle suggère un passé difficile lorsqu’elle se dit coutumière de la souffrance (« Je n’ai pas été habituée à enregistrer le bien »). Il n’y a pour autant rien de grave, simplement de la vie, que toutes deux partagent avec une conscience et une maturité désarmantes.

Projeté en salle à la suite du long métrage documentaire Ce n’est qu’un au revoir, suivant cette fois-ci des terminales dans la Drôme, Un pincement au cœur forme avec lui un diptyque extrêmement cohérent, tous deux étant centrés autour du motif de la fin d’année scolaire qui se termine et des adieux entre amis. Il est intéressant d’écouter l’écho politique qui se crée entre ces deux jeunesses loties à des endroits si différents, et on reste frappé par la force de l’amitié et de la complicité enregistrées assez miraculeusement par la caméra.

Bande-annonce

2 avril 2025 – Documentaire de Guillaume Brac


Egalement disponible sur OCS/Ciné+