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UNDER THE SILVER LAKE

À Los Angeles, Sam, 33 ans, sans emploi, rêve de célébrité. Lorsque Sarah, une jeune et énigmatique voisine, se volatilise brusquement, Sam se lance à sa recherche et entreprend alors une enquête obsessionnelle surréaliste à travers la ville. Elle le fera plonger jusque dans les profondeurs les plus ténébreuses de la Cité des Anges, où il devra élucider disparitions et meurtres mystérieux sur fond de scandales et de conspirations.

Mélange des genres

Après la révélation It Follows en 2015, c’est peu dire à quel point le réalisateur David Robert Mitchell était attendu au tournant pour son film suivant. Présenté au festival de Cannes 2018 où il reçut un accueil plus que timide, Under The Silver Lake n’a malheureusement pas réussi à renouveler ‘’la hype’’ générée par le film d’horreur de son auteur ; en témoigne une sortie polie mais discrète en France (environ 200 000 entrées) et un joli flop au Box-Office mondial (2M récoltés). Pourtant, il serait injuste de ne pas redonner une chance à cette œuvre décalée et tortueuse, qui n’en finit pas d’interroger notre regard sur la pop-culture.

Si Under The Silver Lake a laissé autant de monde sur le carreau au premier visionnage, c’est qu’il cherche sciemment et constamment à faire perdre au spectateur tous ses repères et attentes pendant les 2h20 que dure le long-métrage. 

Démarrant comme une comédie décalée autour d’un loser en quête de sens pour combler le vide abyssal de ses journées, le film flirte ensuite avec la bluette romantique pour soudainement prendre la voie du film à enquête teinté de thriller. Le spectateur est plongé dans quantité de scènes toutes plus loufoques, oniriques (voire psychédéliques) les unes que les autres. Et tout cela avant de tomber sans crier gare dans l’horreur quasi surnaturelle ! Des ruptures de ton particulièrement déconcertantes qui confèrent au film un parfum d’étrangeté totalement en phase avec les errances de son héros, Sam (interprété avec par un Andrew Garfield lunaire).

Mitchell joue avec son public, l’obligeant à être aussi attentif que son protagoniste principal dans ses investigations. Chaque scène, décor et photogramme recèle son lot d’indices et de codes à déchiffrer. Et s’il est très stimulant dans un premier temps de se balader dans cet univers iconoclaste où chaque élément de l’enquête a un rapport intime avec la pop-culture, on constate assez rapidement l’impasse vers laquelle se dirige notre (anti) héros. 

Génération désenchantée

Sam tourne en rond dans un Los Angeles aussi enivrant qu’inquiétant (qui n’est pas sans rappeler celui de Mulholland Drive). Et à mesure que l’intrigue avance vers des recoins toujours plus improbables, Sam, s’enfonce, lui, dans un puits sans fond de références pop-culturelles, lesquelles deviennent l’unique prisme par lequel il est capable d’appréhender sa vie et son environnement.

Et c’est bien là que se dessine l’une des clés du film : le portrait sombre d’une époque/génération incapable de s’accomplir pleinement et ayant perdu tous ses repères, tant elle s’auto-gave de références pop-culturelles jusqu’à l’écœurement, sans plus jamais les comprendre ou les remettre en perspective. En cela, le film offre un contrepoint passionnant à Ready Player One, de Steven Spielberg, sorti la même année et qui partage la même réflexion désabusée… Les deux œuvres se complètent même jusque dans leur conclusion où les cinéastes choisissent d’offrir  une résilience à leur personnage principal.

Bien évidemment, et comme tout film à énigme, le film propose plusieurs degrés de lectures. L’intrigue labyrinthique (et délibérément cryptique) ouvre de nombreuses portes qu’elle ne referme que très rarement, ajoutant toujours plus au caractère insondable de l’œuvre. Et à la manière d’un Lynch, le film s’immisce insidieusement dans l’esprit de son spectateur, l’invitant à revisiter son œuvre, encore et encore afin d’(espérer) en déchiffrer le code… 

Trois ans plus tard, force est de constater qu’Under the Silver Lake fait toujours l’objet de théories et débats entre passionnés. Et nul doute que le lac argenté à encore de nombreux secrets à révéler…

#LBDM10ANS

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