UNE NUIT
Paris, métro bondé, un soir comme les autres. Une femme bouscule un homme, ils se disputent. Très vite le courant électrique se transforme… en désir brûlant. Les deux inconnus sortent de la rame et font l’amour dans la cabine d’un photomaton. La nuit, désormais, leur appartient. Dans ce Paris aux rues désertées, aux heures étirées, faudra-t-il se dire au revoir ?
Critique du film
Avant même de réaliser Guy, Alex Lutz nourrissait déjà l’envie de raconter une histoire d’amour qui débuterait par une dispute dans le métro, scène qu’il avait pu observer, intrigué, et avait noté dans un coin de sa tête. Lors de la cérémonie des César 2019, où il fut récompensé pour sa seconde réalisation, il confie cette idée à son amie Karin Viard et son désir de questionner le couple dans un espace-temps resserré, celui d’une nuit.
Cette nuit qui leur appartient, et qui démarre sur les chapeaux de roue. En se précipitant dans une rame bondée, Nathalie bouscule Aymeric, qui lui fait remarquer. Elle s’emporte, il lui reproche son manque de sincérité dans ses excuses. Leur joute verbale amuse les autres passagers. Ils se disputent mais ils se plaisent. Finalement, ils font l’amour fougueusement dans le photomaton. Au moment de se séparer, une question fuse et lance une discussion existentielle. Le début d’une longue nuit de déambulations et d’expériences pour se connaître, se reconnaître, se retrouver avant de, peut-être, se séparer.
Ça commence par la fin
Avec Une nuit, son quatrième long métrage qui a eu les honneurs de la sélection cannoise, et plus précisément de la section Un Certain Regard dont il faisait la clôture hors compétition, l’acteur-réalisateur révélé sur la chaîne cryptée raconte un couple en pleine (re)naissance. Il les filme dans Paris, suit leur fugue hors du temps et des impératifs du quotidien. Mais cette récréation, où ils tentent l’un et l’autre de retrouver le goût des premières fois et les sensations de ces 20 ans qui n’existent pas (la fête, les expériences saugrenues), laisse jaillir les doutes et les regrets. Quitter la vie pour mieux l’observer et la raconter. Voilà ce que tentent de faire Nathalie et Aymeric, affranchis de leur smartphone et libérés de leurs obligations sans se soucier des conséquences.
Son auteur l’assume, « il y a eu beaucoup d’improvisation autour d’un canevas de dialogues très écrits« . Cela pourrait offrir plus de spontanéité et de vitalité à ces moments de confessions et de complicité, pourtant c’est l’inverse qui se produit. Toujours à la recherche du bon mot, à greffer certaines séquences sans se soucier d’une quelconque vraisemblance, forçant le trait par ci, appuyant une émotion par là, le film s’enlise dans un manque d’authenticité qui finit par fatiguer là où le charme devrait opérer. Se croyant plus malins et érudits qu’ils ne le sont, Lutz et Viard jouent les philosophes noctambules dans ce qui ressemble davantage à une pièce de théâtre sur-écrite où les dialogues finissent par sonner faux à force d’avoir été ressassés.
Comme dans une dissertation plus présomptueuse qu’intelligente qui enchainerait les lieux communs sur la vie et le couple, Une nuit enchaîne de pénibles assertions telles que « Le courage, c’est d’avoir le moral« . Et même quand le film se trouve une belle idée, inattendue, il trouve le moyen de la gâcher en explicitant ce qui aurait du rester suggéré.
