UNE PRIÈRE AVANT L’AUBE
Inspiré d’une histoire vraie, voici la tranche de vie Billy Moore, un boxeur anglais à la dérive, tentant de survivre après son incarcération dans l’une des plus dangereuses prisons de Thaïlande.
Midnight in a perfect world.
C’est peut être un détail, c’est peut être anecdotique, ça n’a peut être rien à voir. Mais quel joli titre que Une prière avant l’aube. Dur et tendre à la fois. Un bon résumé du ressenti du spectateur sur le nouveau film de Jean-Stéphane Sauvaire, le réalisateur de Johnny Mad Dog. De par son synopsis, le parallèle évident de ce survival en milieu carcéral extrême est, un peu facilement, Midnight Express, la référence d’Alan Parker. Des facilités, d’ailleurs, il y en aurait eu mille à faire à propos de ce Billy Moore (absolument formidable Joe Cole, aperçu au détour de Black Mirror, Peaky Blinders et Green Room, à surveiller), boxeur anglais exilé en Thaïlande pour fuir un passé dont le cinéaste a le bon goût de ne pas étaler le pathos. Occidentalisme nombriliste, rédemption linéaire, violence gratuite : autant d’idioties qu’Une prière avant l’aube évite avec bonheur.
Pourtant, le spectre de l’occident plane sur ce boxeur conscient qu’il est loin de tout, de ses repères, de sa famille, de sa morale, mais là n’est pas le sujet central : cette perte d’équilibre, elle est un peu voulue, dans un geste masochiste inconscient. De la rédemption il y aura, mais pas de la manière dont on pense : par un amour impossible et pur précisément pour cette raison, par le sport déshabillé de ses mensonges pour revenir à l’expression d’un jeu de vie ou de mort. De la violence, évidemment, par des scènes dures qui marquent durablement la rétine, à la limite du supportable, mais jamais dans le cadre d’un esthétisme content de lui et donc nauséabond. La violence d’Une prière avant l’aube n’est pas à destination du spectateur. Elle est, que Billy en soit auteur ou victime, une manière de se débarrasser du superflu ou de réacquérir le fondamental.
Sauvaire s’est investi dans son sujet, filme avec pudeur un personnage qui l’est tout autant. Alors, sa caméra devient le dernier allié de Billy, au plus proche de lui en plans rapprochés étouffants lorsqu’il est seul, impuissante et distante lorsqu’il se fait balader dans un royaume dont il ne possède ni les clefs, sûrement pas la couronne, et encore moins la faveur des seigneurs. Et puis il y a ces situations qui le dépassent un peu. Où il se dépasse malgré son destin fait de coups et de sang et de poussière. Et c’est peut être là qu’Une prière avant l’aube est le plus beau : lorsqu’il parvient à prendre de la distance avec les mémoires de Billy, le vrai cette fois, pour amener une touche de rêve, de poésie et de beauté à sa chienne de vie. Une touche de cinéma, en somme.
La ficheUNE PRIÈRE AVANT L’AUBE
Réalisé par Jean-Stéphane Sauvaire
Avec Joe Cole, Vithaya Pansringarm…
France – Drame
Sortie : 20 juin 2018
Durée : 116 min